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DÉDICACE: MOI, JARDINIER CITADIN

Et non pas : dédicace-moi, jardinier citadin !, qui vous en conviendrez transmet un petit côté licencieux qui n'est pas sans rappeler les gauloiseries télévisuelles du samedi soir très tard.

Min-ho Choi, auteur de Moi, jardinier citadin et visiblement... jardinier citadin, nous fait la surprise d'une apparition parisienne après quelques jours dans la capitale des assiettes fragiles (Limoges, aussi connue pour une superbe médiathèque me précise Igor). Il passera un petit moment en notre et votre compagnie lelundi 7 avril de 17h30 à 20h. C'est son unique traversée des environs et il faudra attendre une hypothétique prochaine parution française avant d’espérer pouvoir le croiser à nouveau.

La moitié de l'internet spécialisé a déjà relayé l'information alors il serait temps que nous en parlions aussi.

La première chose que vous apercevez de ce titre en le croisant en librairie, c'est bien entendu sa couverture. Elle donne efficacement le ton de tout le titre. Malgré quelques moments de tourmente — plus météorologique qu'intérieure — l'horizon est définitivement dégagé dans cette bande dessinée. La seconde chose que vous distinguerez, lorsqu'une fois intrigué par la couverture vous retournerez l'album, c'est une mention sur la quatrième de couverture. Une citation. La première parole de Min-ho Choi que vous lirez de tout cet album autobiographique.

Ce livre n'est pas un manuel sur la culture des légumes.

Et en effet, ce n'en est pas un. C'est tout simplement une transmission de sentiment. Ça n'est pas un almanach à accrocher au dessus des toilettes,  qui réglera la période des moissons et vous enjoindra à scruter l'évolution des lunes. C'est un concentré de plaisir. Le sien. Celui de l'auteur. C'est une graine qu'il essaye doublement de faire germer: dans son livre et dans son lecteur. Moi, jardinier citadin est comme un texto que vous recevriez d'un copain, excité par un événement de sa vie ou prêt à vous raconter une graaaande nouvelle. C'est l'émerveillement juvénile d'un auteur qui se laisse pleinement porter par son enthousiasme. Le compte-rendu d'un pur plaisir qui donne envie de s'y mettre aussi.

De là provient d'ailleurs une triple énonciation de l'enfant: dans un plaisir absolu, libérateur et virginal semblant nécessairement lié à un retour à la terre (ou alors l'auteur a un penchant marqué pour l'exaltation, nous le découvrirons ensemble), dans une considération toute parentale du jardinier vers son potager (volontairement accentuée par les mimiques de Min-ho Choi) puis dans une analogie découlant de la grossesse de la femme de monsieur Choi. Tous ces éléments sont des porteurs de joie et d'excitation poussés à l'extrême.

soul potager

Moi, jardinier citadin est un hymne à la joie et aux sentiments les plus vertueux. Une symphonie fantaisiste qui sacre non pas uniquement le printemps mais aussi la beauté de la pousse et de la candeur. Imaginez le titre dans toute sa musicalité. Des flûtes, des instruments à vent légers et enjoués, un coup de cymbale tonitruant de temps à autres et un parfum de printemps continuel dans l'air et les oreilles.

Avant de s'essayer à cette ode, on apprend que l'auteur, qui n'en est d'ailleurs pas à son premier récit, a officié dans le cinéma d'animation. Il en retient un style qui accompagne très bien son histoire, qui permet une adéquation lumineuse. On distingue de ses aquarelles informatiques un fond de retouche photo. Cette façon de travestir le réel est rarement efficiente en bande dessinée (n'en déplaise aux amateurs de Frédéric Boilet) mais concentré sur les légumes, en opposition à des personnages grotesques et rehaussé par des palettes divinement printanières tout au long du récit, sa technique confère beaucoup de complicité, de tendresse et de poésie à un fil de vie que l'on ne peut plus imaginer dans un autre média. Un prisme de plus beau (et non pas de plus belle la vie), qui redonne du grain aux légumes et pourquoi pas carrément de la force vitale.

Moi,  jardinier citadin pour toi, consommateur urbain

 Min-ho Choi découvre la terre, découvre le labeur et toutes les saveurs que ça engendre, certes. Mais deux autres points de vues sont à prendre en compte.  Le lecteur qui aime déjà la nature, qui a la main verte, un potager ou qui s'intéresse au bio se plongera avec bonheur dans une interconnexion de divers plaisirs qui feront échos à ses pratiques. Le néophyte  conquis, qui découvre tout ça par hasard ou vague intérêt, met le doigt sur  tout un système de potagers partagés bien plus accessibles qu'il n'y parait. Une liste finale post-manhwa  de sites web sur le sujet englobe bien tout ce dont le prosélyte du potager français aurait besoin dans l'optique de se lancer pour de bon dans une aventure de jardinage peut être au bout de sa rue.

Min-ho Choi ne partage que très peu son labeur, préférant s'attarder sur l'évolution de ses plantations et l’interférence humaine inhérente au concept de potager qu'il tente de minimiser au profit d'une gestion biologique, pas encore écologique mais quoi qu'il en soit bien plus saine.   Au final il en ressort une impression de fraîcheur, comme une combinaison diabolo-mentos (kiss cool pour les moins jeunes)-ciel bleu d'un effet revigorant du tonnerre.

Moi, jardinier citadin, T1, Min-ho Choi, Akata, 21,50€

Moi, jardinier citadin, T2, Min-ho Choi, Akata, 21,50€ aussi.

Dédicace, je le rappelle pour tout ceux qui l'avaient progressivement oublié à la lecture de l'article, le lundi 7 avril de 17h30 à 20h. Je ne sais pas encore ce qu'Aaapoum préparera de bio, de rigolo ou de bio-golo pour l'évènement mais nous offrions déjà des plants de tomate en 2009 alors ça devrait couler de source.

Nous préfèrerions que vous achetiez votre tome (1 ou 2) à dédicacer chez nous mais si vous étiez totalement trop excité à la sortie du T2 et que vous avez sauté dessus, nous vous laisserions tout de même intégrer la file de dédicace suite à un achat de valeur pécuniaire équivalente le jour j. Pensez aussi que l'album peut être bon à offrir. Comme une mamie qui offre un bon panier de légume à son petit fils citadin qu'elle ne voit jamais. Ou comme une entité bienveillante offrant ce marchepied graphique à un jeune homme qui à regret n'a encore jamais passé le premier pas du panier bio.