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BAGGI : TRAVAUX ET L'AFFAIRE LORETTA STEVENS

Les univers cannibales

À propos de Travaux et de L’affaire Loretta Stevens de Alessandro Baggi.

Alessandro Baggi ne compte guère à son actif qu’une poignée de Dylan Dog et d’albums divers qui n’ont soulevé l’enthousiasme ni en France, ni de l’autre côté des Alpes. L’auteur a pourtant quelques qualités à faire valoir, notamment son dessin soigné. Quand son style ne revisite pas le comics ou l’école française moderne, il s’appuie sur le classicisme italo-argentin, tendance Alberto Breccia ou Dino Battaglia, selon les besoins de l’intrigue. Malgré le faisceau de références qui convergent dans son dessin, le travail de Baggi n’a rien d’un fourre-tout, car l’auteur se réapproprie la technique du patchwork ou du photomontage cher aux surréalistes italiens. Travaux ou L’affaire Loretta Stevens sont en outre hanté par la présence de Buzzati, Lovecraft… ou Steve Gerber (Howard the Duck). Baggi recompose à chaque fois un récit onirique qui glisse immanquablement vers l’horreur la plus noire.

Le héros de Baggi est toujours inaccompli. Sa peur puise son origine dans la certitude qu’il n’y a pas d’issue. Quoi qu’il fasse, il est d’ors et déjà condamné à revenir à l’état primal ; à être happé et ensuite digéré dans quelque chose d’utérin et à la fois intestinal… pour l’éternité.

Les tentatives de Baggi, en dépit de leur manque de reconnaissance, prouvent qu’une bande dessinée transalpine affranchie des canons des fumetti et des récits prattiens existe bel et bien. Nos boutiques proposent chacun de ces deux titres à 9 euros (au lieu de 13).