Études comportementales

 

L'avis de l'expert !

par Vlad

Ce matin j'ai eu la surprise de recevoir les remerciements de Thibaud,  accompagné de son mémoire de Master à la Sorbonne de "Marketing et Stratégie d'entreprise" sur les comportements de consommation des collectionneurs, et particulièrement dans le monde de la bande dessinée. 378 pages... Dont les deux tiers d'entretiens, de collectionneurs, d'éditeurs et de vendeurs, dont un avec moi.  Thibaud a obtenu une mention bien, bravo à lui, faut dire que son boulot à l'air sérieux. Je sens qu'il y a matière à plein de dessins distrayants là-dedans...

En lisant la transcription de mon entretien déjà, j'ai bien ri. Les mots formulés oralement autour du café écrits noir sur blanc dans une œuvre universitaire prennent soudain un air sentencieux, définitifs et mûrement réfléchis... Dans un élan narcissique irrépressible, j'ai même trouvé que des fois je disais pas que des conneries !

Ci-après, quelques extraits...

“Les tranches numérotées”

"Donc il y a vraiment tout une offre de produits spécialement pour les collectionneurs, et c’est une offre qui encourage, qui est là pour exciter cette tendance à collectionner qui existe peut être dans chacun des acheteurs de bandes dessinées. Il y a un fond collectionneur cheztous les acheteurs. Dans les années 1980, fin des années 1980, tous le séditeurs ont commencé à mettre des numéros sur le dos des séries. Avant ça ne se faisait pas du tout ; quand tu avais un Astérix il n’ y avait pas marqué Astérix numéro 6, on s’en fichait on pouvait les lire dans n’importe quel ordre, pareil pour les Blueberry ça n’existait pas les numéros ! Et maintenant tu remarqueras que toutes les vieilles séries ont des numéros, et bien ça c’est une technique pour exciter l’instinct collectionneur chez les gens parceque si tu as des numéros et que tu vois qu’il y a un trou, ça gène l’esprit.Alors que s’il n’ y a pas de numéro, tu t’en fiches.

"Les listes de recherche"

On a des collectionneurs qui ontdes listes qui sont remplies en creux et d’autres en plein. C'est-à-dire ily en a qui notent ce qu’ils cherchent précisément et d'autres qui marquent les titres qu’ils ont déjà, ce qui dénote l’idée que çapeut s’agréger plus facilement. Sachant que pour un collectionneur sur deux, sa liste n’est pastenue à jour, ou il la perd. D'ailleurs, il y a quelque chose de bizarrelà-dessous. Moi je trouve ça bizarre, quelqu’un qui passe plusieurs heures parjour sur sa collection et qui trouve le moyen de laisser des erreurs dans saliste et de ne pas la tenir à jour ou qui trouve le moyen de la perdre une foissur deux, ou de l’oublier une fois sur deux chez lui, je trouve ça étonnant.C’est comme un shérif qui sortirait sans son colt, c’est super étonnant. Jesuis toujours étonné de l’importance que leur liste revêt pour certainscollectionneurs, et le fait qu’ils ne l’aient jamais sur eux ou qu’elle estperdue ou qu’elle est pas tenue à jour. Ça leur permet d’acheter plusieurs foisla même chose...

"La transmission du patrimoine"

Et pour pouvoir transmettre leur collection ils essaient souvent de transmettre le goût de la BD à leurs enfants, pour pas voir leur collection finir dans un grenier. Je rencontre beaucoup ici d’ailleurs des collectionneurs de père en fils, de père en fille,de mère en fille qui viennent ensemble. Il y a une transmission du goût pour la collection et surtout du goût pour la BD, je pense qu’ils doivent tous essayer et ça doit rater dans certains cas, mais ça m’arrive très souvent de voir des familles entières de collectionneurs. C’est courant, surtout maintenant que ça fait un certain temps que ça existe la collection de BD en France. Maintenant il y a deux parfois trois générations de collectionneurs en bande dessinée. En fait les collectionneurs ont très peur que leur collection soit vendue au rabais ou oubliée dans un grenier, et le meilleur moyen d‘éviter ça pour eux c’est que leurs enfants soient devenus eux même collectionneurs de BD. Et après ce qui est marrant, c’est de voir les fils ou les filles de collectionneurs ou de collectionneuses qui collectionnent des choses légèrement différentes de leurs parents. Ils ne veulent pas faire la même chose, les mêmes séries parce que ça ne sert à rien puisque de toute façon les parents les ont déjà dans leur collection et comme ils l’auront un jour...  Et là pour les enfants c’est une manière de se distinguer. Ils vont pas racheter des BD en double puisque c’est déjà dans le patrimoine familial."