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POURQUOI NOUS AVONS PARFOIS L'AIR DE C*** HAINEUX
 

"Interdiction absolue d'ouvrir les pochettes !" pouvait-on lire récemment sur de nombreux petits panneaux rue Dante. C'est que notre collègue Pierre-Yves redoute par dessus tout la détérioration des ouvrages placés sous pochettes à vocation protectrice. Cette protection est en effet à double tranchant. Comme nos pochettes sont scellées autour de l'ouvrage fragile soit par du scotch, soit par une bande de colle préexistante, elles nécessitent un certain doigté pour l'extraction et la réintroduction de leur contenu. Il est bien légitime que le curieux et l'amateur veuillent consulter un ouvrage avant de savoir s'ils ont vraiment envie de l'acheter...

Il est en revanche regrettable qu'un objet fragile soit détérioré bêtement après avoir tranquillement préservé sa beauté à travers les décennies. J'ai moi-même dans la boutique de la rue Serpente pendant longtemps dissuadé les brutes et les maladroits de s'attaquer aux petits formats par une formule qui alors choquait Alexandre : "Devant la recrudescence de salopards s'ingéniant à détruire les petits formats, il est désormais INTERDIT d'ouvrir les pochettes. Si vous voulez consulter un ouvrage, demandez à un LIBRAIRE !"

Notre collègue Anton, d'un naturel doux et optimiste, bien qu'il écoute le plus souvent de la musique lugubre, était choqué par les étiquettes. Aussi les retira-t-il avec l'assentiment de Stéphane, qui comme chacun le sait est le symbole même de la douceur englobante qui, tel le roseau courbe face à l'adversité pour mieux se redresser, ou qui, plus exactement, tel l'édredon, épouse les coups sans douleur pour mieux les retourner.

Malheur, comme pour donner raison à la scrupuleuse méfiance de Pierre-Yves, une belle couverture a été détériorée par une brute mystérieuse et honteuse, qui a dissimulé son forfait.

Regardez l'image du début... Si Tondu a l'air fâché, c'est peut-être à cause de ce nuage dans le ciel si bleu... Mais... Mais ! Ce n'est pas un nuage ! C'est un déchirure de la couverture, la première couche a été partiellement arrachée ! Regardons maintenant la seconde image...

Oui on voit bien sur la bande collante le petit bout de ciel manquant sur la couverture. Dire que cet album a été imprimé en 1959 (il s'agit de l'édition belge de Plein Gaz, le septième Tif et Tondu dessiné par Will), et qu'il vient se faire esquinter par un client dans une boutique spécialisée. C'est vrai que c'est rageant. Pas tant pour le prix (encore que, sa valeur vient bien de chuter de 50 €, c'est pas rien), mais dans le principe : ce n'est pas la vocation de la boutique que d'accélérer la destruction des belles pièces.

Bref, c'était pour vous expliquer pourquoi on est souvent un peu chiants et pourquoi on se méfie des clients qui ouvrent les pochettes sans demander la permission, et pourquoi on vous propose souvent de ranger les ouvrages nous-même.

Il y a 5 ans j'avais déjà écrit un article sur ce passionnant sujet, vous pouvez le lire ici.