L'éternaute tome 2

 

"Et le sol continuait à trembler

comme si aux alentours galopaient des géants."

En refermant ce deuxième tome de L'Éternaute vous êtes partagé entre deux sentiments : angoisse et émerveillement. Votre cœur est éprouvé par cette longue lecture qu'il vous a été impossible d'interrompre. Si vous avez commencé avant de vous coucher, la nuit est maintenant bien installée. La ville est silencieuse. Il va peut être se mettre à neiger. L'aube se lèvera-t-elle ? Sera-ce le dernier jour de l'humanité ?

Quel dommage que disparaisse une civilisation capable de produire de tels joyaux littéraires.

L'omniprésente voix-off — celle de Juan Salvo — vous aura entraîné aux confins de la peur dans le plus implacable des suspens. Tel le héros, pour échapper à la folie il vous aura fallu aller de l'avant. Juan Salvo,  (dont on ignore encore à ce stade du récit comment il en est venu à s'appeler "l'éternaute") n'a pas le temps de dormir : vous ne dormirez pas non plus.

Rares sont les récits de la bibliothèque du neuvième art qui possèdent cette capacité de dévorer leur lectorat. Oui, ce n'est pas le lecteur qui en avale les pages, c'est bien le livre qui mange le lecteur. Son univers déborde, Oesterheld et Solano López vous l'assènent avec constance et persuasion et, insidieusement, vous y êtes : à l'intérieur du livre, avec la neige fatale et les monstres. Ce qui est loin d'être rigolo mais d'une beauté mortelle, comme le disent les protagonistes dans le tome 1. Ce qui apparaissait, lors d'un feuilletage superficiel, côté texte, comme une abondance de récitatifs un peu désuète et, côté dessin, comme un sobriété un peu dépouillée se révèle être un redoutable arsenal de guerre narratif.

Ceux qui n'ont aucune idée de ce que peut bien raconter L'Éternaute, je  vais les renvoyer à ma chronique locale du tome 1. Ceux qui étaient des nôtres en janvier savent bien de quoi il retourne, mais seront certainement surpris par le rythme de ce deuxième tome. Si le premier contenait un huis-clos durable, cette suite est une avalanche de péripéties pourtant enchaînées avec logique et sans précipitation. À la 23e page vous serez tout simplement halluciné de constater qu'il vous en reste près d'une centaine d'ici à la quatrième de couverture et touché par tant de générosité feuilletoniste : dire qu'avec ces 23 pages un Corbeyran nous aurait vendu une multi-série sur 3 niveaux et ce bienveillant Joann nous aurait proposé un bottin...

Familliers de la version Breccia, sachez que vous entrer là en territoire complètement inconnu : rien de ce qui va se dérouler n'est évoqué dans les 8 dernières pages de la version 1969.

L'Éternaute, tome 2,

116 pages, noir et blanc. Couverture cartonnée.

24 €.

Parution jeudi 9 juillet 2009

Oui, vous avez bien lu. Amis du carton réjouissez-vous : c'est bien en HARD COVER comme disent les yankees, que paraît ce tome 2. C'est la faute à tous ces libraires de neuf qui ont chouiné que c'était fragile en broché, que ça se tenait pas... et patati et patata. Du coup 4€ de plus (ce qui reste tout de même très raisonnable). Pour l'occasion, le tome 1, dont le premier tirage est pratiquement épuisé, va lui aussi bénéficier d'une réédition cartonnée.