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Daredevil, par Maleev & Bendis
 

Bon anniversaire, ange ou demon ?

Par Stéphane

Ça commence à se savoir dans l’industrie du comic book, Brian Michael Bendis restera le scénariste américain le plus doué de ce début de XXIeme siècle. Powers, où les aventures d’un duo de policiers dans un monde envahi de superhéros. Alias, récit de la réinsertion d’une superhéroïne qui abandonne le port du costume à la suite d’un drame violent. Autant de terribles chefs d’œuvre au traitement adulte, et auxquels s’ajoute la reprise du célèbre Daredevil. Une série à laquelle Vlad et moi avons converti nombre de nos clients, jusqu’au Saint patron Jacky qui, samedi dernier, s’eclipsait une petite heure de la boutique en emportant le nouveau recueil que je venais fraichement de m’acheter. Si vous trouvez qu’il y a un champ lexical du religieux particulièrement développé dans les lignes que vous venez de parcourir, c’est normal. Daredevil et le Christ ont un tas de choses en commun. Bon sujet, non, pour un lundi de paques?

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Pour mesurer le travail de Bendis sur cette série, il faut remonter un peu dans le temps. En 1980, le "diable rouge de Hell’s Kitchen", comme le nomment ses ennemis, prend sous la plume de Frank Miller une toute nouvelle dimension : création d’un lien entre port du masque et idéologie –ici religieuse-, et d’un autre entre port du costume et déviance psychotique. Je n’en dirais pas plus à ceux qui ne l’ont pas lu, mais lorsqu’il abandonne la série, DD, comme le nomment les intimes, a des allures d’icône au sens pieux du terme, oscillant entre martyr condamné au deuil et justicier menacé par la déchéance du faux pas amoral. Une vision qui perdure jusqu’aujourd’hui et que l’adaptation cinématographique, médiocre, retranscrivait bien.

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Pour le plus grand plaisir des lecteurs avides de scénarii ambitieux et matures, Bendis approfondit le traitement pour la première fois en presque vingt ans. Il s’agit maintenant de confronter l’avocat justicier à de nouveaux démons en conservant cet équilibre précaire – la fine ligne rouge à ne pas fanchir- en toile de fond. Et de tester les limites, quitte à provoquer la rupture. Plus sombre et ambiguë que jamais, porté par le dessin au photoréalisme urbain et crade de Maleev, la série peut sans embarras prétendre au titre du meilleur comic mainstream en court de parution. Ça tombe bien, ce dixième volume sorti jeudi dernier (sixième en vrai car le cycle de Bendis commence au tome 4) marquait aux USA les 40 ans du héros.