Publications dans Juin 2008
Poésie du samedi
 

Bienveillance versifiée

Un de nos voisins, lecteur occasionnel de ce blog,  est un homme charmant, un peu fantasque et très chatouilleux sur certains sujets, notamment l'enseignement supérieur. Plusieurs fois par semaine il nous offre ses poésies. Ses inspirations sont parfois surprenantes, outre Valérie Pécresse on y croise souvent  des carabins constipés, des  réverbères  magnifiques et des cantinières girondes ou acariâtres. Inlassable arpenteur de la proximité il s'est enfin décidé à chanter les connivences du neuvième art et de la rue Dante. Le résultat est reproduit ci-contre, veinards amis lecteurs.

Avant-hier il semblait décidé à élaborer un texte dont le sujet serait "Stéphane et Vladimir". Tout un programme. Merci Jean.

 
Farandole de mangas et manhwas à 2€ !
 

Presque indécent

Conséquence de la flambée du pétrole ? De la surproduction bédéïque ? De la hausse des loyers ? Les causes sont floues mais les faits sont là : 25 séries d'origine extrême-orientale ont débarqué chez nous  au tarif extrêmement avantageux de 2€ le tome.

Ainsi les plus rétifs et les moins fortunés pourront, par exemple, enfin découvrir la fameuse série Umizaru l'ange des mers, gros succès nippon (complète en 12 tomes) pour la somme risible de 24€. Et oui 12 fois 2€ pour plus de 2500 planches d'aventures alliant sauvetages en mer et lutte contre la piraterie.

La liste détaillée des séries de cette promotion sera envoyée aux abonnés de l'aaaniouze (dite "newsletter d'aaapoum bapoum" par les amis de Shakespeare et de Garth Ennis) d'ici la fin de la semaine.

 
L'art de la BD : Heath + Fernandez + Matena, éditions Campus
 

Un recueil cosmopolite

Après un mois de silence, dû pour ma part à un visionnage intensif de The Wire, nous revoilà pour exhumer des vieilleries.

En 1982 les éditions Campus entamèrent la publication d'une revue modestement intitulée "L'art de la B.D.". Son principe était à chaque numéro de proposer en 66 pages une sélection de nouvelles d'un auteur. Le tout dans un noir et blanc fort correctement imprimé. Il n'y eu que 4 numéros. Les trois premiers furent regroupés dans une reliure. Sont ainsi rassemblés trois auteurs d'horizons forts différents.

Russ Heath, Fernando Fernandez et Dick Matena.

Le premier est étasunien, le deuxième est un espagnol qui a travaillé en Argentine et le dernier, bien connu de nos lecteurs pour son hommage à Astérix, appartient à la catégorie des Hollandais inclassables.

Ces trois artistes parcourent chacun une veine différente  du dessin réaliste. Heath privilégie l'outrance des attitudes et des expressions et ses ombres usent pleinement de leur fonction d'accentuation.

Fernando Fernandez, dont l'adaptation de Dracula est assez appréciée des amateurs d'épanchement chromatique, s'adonne lui totalement à son inclinaison pour la luxuriance décorative. Le maniérisme de ses planches  et de ses volutes graphiques n'entame pas la force de son dessin. Un calviniste de l'œil pourrait certes lui reprocher une certaine futilité et une volonté démonstrative immodeste... 

Ce serait oublier que l'hidalgo semble prendre un grand plaisir sur ses planches et que sa jubilation est communicative. S'il enlumine ses propres histoires là où Heath se met au service des textes d'autrui (Archie Goodwin, Bruce Jones...) les deux hommes arpentent le même genre : l'historiette fantastique moraliste et édifiante. Mais Heath a volontiers recours à l'humour quand Fernandez teinte tout d'une nostalgie désespérée. Même cette curieuse histoire d'un homme dont l'âme pue (littéralement) ne prête jamais à sourire, alors qu'on imagine ce qu'elle aurait pu donner entre les mains d'un Larcenet ou d'un Edika...

Dick Matena, le troisième embarqué de ce recueil, creuse lui un sillon moins identifiable. Ses inspirations disparates peuvent l'amener aussi bien à des histoires de science-fiction absurde ou cynique, qu'à une transposition futuriste du roman noir, ou à des espaces confinés, emplis d'un tension sexuelle malsaine et de pantins théâtraux. Ses planches expriment une distance froide qui est accentuée par un dessin qui semble chercher à polir la moindre de ses aspérités, à ramener objets et êtres vivants à l'état de galets. Il faut noter au passage que si le vivant et le minéral semblent être traité de la même façon par Matena, le règne végétal est le parent pauvre de son œuvre, réduit dans ses rares occurrences à ses formes périphériques que sont les champignons et les cactus. Dans l'ouvrage qui nous importe ici il y a même une histoire ou la végétation (résumée en ombres chinoises et tentacules) est clairement identifiée comme l'ennemi : "Ce sont des plantes carnivores ! Elles gardent les restes pour plus tard !" (dans Intermède 1).

Cette reliure, dont une belle pile nous est échue, est vendue chez nous pour la somme modique de 3€. Trois euros pour 198 pages de belle BD en noir et blanc ça mérite de passer outre la laideur de la couverture et du logo, non ? De plus la largeur de cet ouvrage n'excède pas 1,5 cm... c'est-à-dire qu'il prend la même place que, par exemple, la moitié de l'œuvre d'Aurelia Aurita.