Publications dans Janvier 2011
Tar' taggeur 2
 

Maudit artiste !

N'y a t'il pas un artiste dans le 5ème arrondissement capable de poser un tag décent ?Voici un nouvel exemple du maigre niveau des gribouilleurs de murs de la rue Dante.

Le gars, il voit toute une vitrine avec des dessins de Crumb, Kago, Berthet, etc. et il nous pond quoi ? Une affreuse chiure de bombe qui n'a pas vraiment de sens... Applique-toi un peu quand même. Alors ok, tu fais la nique aux bourgeois dans leur nid, tu es le Mesrine des arts urbains… Mais fais comme les copains, va plutôt jouer sur le périph’ !

"Twine" en anglais correspond à un fil tressé, à moins que tu sois aussi très mauvais en anglais  et que tu aies pensé à Twin (jumeau in french). Dans ce cas, on peut extrapoler et s’imaginer que le doppelgänger d'un Aaapoumien vient saloper pendant la nuit son propre lieu de travail, mais je lis sans doute trop de bande dessinée.

 
Dohé et Yumemakura n'ont jamais été scouts
 

On ne joue pas avec le feu

Taitei no Ken est une série en cours de publication chez Glénat mélangeant allègrement la fantasy, le chambara et la science-fiction, entendez que des ronins y fréquentent des sorciers et des extraterrestres. C'est plutôt délirant et mis en scène sans aucun humour, ce qui est très réjouissant. C'est le coréen Dohé (ou Dohe ou Dohae) qui mène cette adaptation d'une série de romans de Baku Yumemakura.

Il y a des choses que j'admets facilement dans un cadre de fantasy. Les protagonistes courent à reculons, font des bonds formidables, ont des têtes d'animaux... etc. Soit. Ces extravagances sont même recommandées dans ce type de divertissement. Ce que je ne peux accepter, en revanche, c'est qu'on fasse n'importe quoi avec la vraisemblance de l'environnement présenté comme traditionnel et inchangé par rapport à notre expérience du monde. Ainsi quand je vois, au cours du tome 3, Gonzo le chasseur d'ours prendre une branche dans un feu pour s'éclairer la nuit et marcher dans la forêt avec, là tout d'un coup pour moi, tout l'édifice s'effondre et la crédibilité de l'univers se délite. On voit que Dohé, occupé qu'il était à devenir mangaka, n'a jamais eu la chance de poser ses fesses autour d'un feu de camp, et n'a même jamais entretenu un feu de cheminée. En effet, quiconque a un minimum d'expérience campagnarde sait qu'une fois ôtée du foyer toute branche voit sa flamme s'étioler jusqu'à ne présenter bientôt qu'une extrémité rougeoyante... qui ne tarde guère à s'éteindre. Dès lors il est impossible d'espérer s'éclairer avec un tel brandon et encore moins se promener avec.

Pire, plus loin, le gars Gonzo va même jusqu'à enflammer un autre bout de bois juste en le mettant en contact avec sa branche initiale. Bravo. Non seulement c'est impossible, à moins d'avoir tout aspergé d'essence avant, mais en plus on se demande pourquoi ce chasseur éprouve le besoin de se faire repérer à distance par la proie qu'il traque.

Cependant, il ne faut pas en vouloir à Dohé car en fait il se montre, comme à l'accoutumée dans cette adaptation, parfaitement fidèle au texte de Yumemakura (auteur entre autres du Sommet des dieux), également disponible dans la récente collection romans de Glénat sous le titre de L'Epée de l'Empereur :

"Gonzo s'empara donc d'une branche morte qui se consumait dans le feu et vint rejoindre Shirotora [c'est le nom de son chien] en tenant la torche improvisée. [...] Ils marchèrent pendant plus d'une heure. [...] Shirotora vint se placer devant le trou et aboya.Gonzo s'approcha doucement du bord. Il vit quelque chose sans le discerner clairement. Le chasseur ramassa une branche morte par terre, l'alluma, puis la jeta dans le trou.“Qu'est-ce que c'est ?!” s'exclama-t-il d'une voix basse."

Bon c'est pas très grave... Après, grâce à l'arrivée d'une mousse extraterrestre, d'une femme qui se bat avec ses cheveux et d'un artefact catholique qui fait planer, j'ai réussi à me remettre dans l'histoire, mais il s'en est fallu de peu que je ne stoppe ma lecture.

Taitei no Ken tome 5 à paraître le 26 janvier.L'Épée de l'Empereur tome 2 à paraître en juin 2011.

 
Plus forte que le sabre de Hiroshi Hirata
 

Hirata le chantre de l'anti-yaoï

Si comme moi le consensus intello autour de Hiroshi Hirata vous a toujours un peu gonflé, si comme moi vous avez souffert en lisant le pensum qu'est L'âme du Kyudo, alors je vous recommande chaudement la courte série Plus forte que le sabre, qu'Hirata publia au Japon il y a près de vingt ans et dont les éditions Delcourt ont bien entamé la traduction (le tome 2, sur 3, vient de sortir)

Pour un auteur réputé sérieux, Hirata s'y montre bien délirant.C'est le portrait d'une femme forte. Mais alors très forte. Comme Miss Hulk qui manierait le sabre aussi bien qu'Elektra. En plus c'est une formidable mère au foyer (quatre enfants top chrono). Nous sommes au XVIe siècle, il me semble (je ne suis pas très calé en histoire japonaise et je n'ai plus les livres sous les yeux), alors on peut dire qu'en plus elle se montre sacrément en avance sur son temps au niveau de l'affirmation du droit des femmes. Au début de l'histoire elle se marie avec un petit  seigneur féodal fauché et pas très finaud et...

Mais allons directement à l'essentiel :

première séquence d'anthologie : elle prend son beau-père dans ses bras et court le mettre à l'abri d'une attaque surprise de ninjas. (tome 1). L'effet est hilarant et permet de s'endormir le sourire aux lèvres.

deuxième séquence d'anthologie : bien que transpercée par de nombreux coups de sabre, elle met en déroute une bande d'au moins dix brigands. Une séquence d'action aussi bien découpée que les sabres y sont tranchants. Frank Miller ne sait plus faire ça depuis longtemps. (tome 1).

troisième séquence d'anthologie... (tome 2)J'imagine la tronche des lecteurs de Télérama, convertis à Hirata à cause du pensum sus-mentionné quand ils vont tomber dessus... Oui, car les Japonais aussi sérieux soit-ils semblent posséder un goût du trivial qui dépasse notre entendement, en tous cas le mien, à moi qui suis un homme prude élévé dans la lecture de Tourguéniev.

Un des nombreux fils de l'héroïne arrivé à l'âge de 13 ans est pris d'une frénésie sexuelle gargantuesque et viole toutes les femmes du fief. Le père, nobliau soucieux de l'humeur de ses paysans, explique à son fiston que c'est mal et lui conseille plutôt la méthode d'Onan. À laquelle, le fiston obéissant, s'adonne ensuite à longueur de journées dans de grands geysers de liquide séminal (si, si, je n'exagère pas)... Mais ça ne le calme pas vraiment.

Il va falloir que sa mère prenne les choses en main...La deuxième partie du tome 2 est beaucoup moins débile et plutôt finaude au final mais il faut dire que l'auteur y délaisse le fiston queutard pour se rencentrer sur son grand frère qui, lui, s'intéresse aux arts. Ouf.

 
L'éternaute, nouvelle édition mexicaine
 

Avis aux collectionneurs compulsifs :

L'éditeur mexicain RM a publié il y a peu une nouvelle édition de L'Éternaute qui se veut conforme à la publication originale dans l'hebdo d'Hora Cero, c'est-à-dire avec titrailles et résumé à chaque épisode, traces de son origine feuilletonesque gommées logiquement dans les ultérieures éditions en albums.

L'occasion pour les curieux de comparer avec notre édition française (Vertige Graphic) forgée à partir des originaux !

La couverture mexicaine, signée Jorge Alderete, artiste né en Argentine et vivant au Mexique,  partage les aficionados.

Source : La Cárcel de Papel

 
South Park ne devrait jamais jamais être une bande dessinée.
 

Si tu as acheté cette BD, ce n'est pas Cartman qui l'a dans le fondement.

J'aime la série animée South Park, j'aime la bande dessinée dans son ensemble, par contre je n'aime vraiment pas South park en bande dessinée.

Cet "anime-comics" comme disent les japonais, du premier épisode de la série est d'une rare laideur !

Les captures d'écran composant les cases ont été torchées par un sagouin sans nom, tout est flou, on dirait que le photographe a fait tomber son objectif dans la vaseline.

Le texte off, non présent dans la série originale, n'est que paraphrase ; il n' apporte rien sinon prendre son lecteur pour un abruti.

La collection Jungle de Casterman est une cible facile, et leur production n'intéresse pas vraiment les lecteurs de BD ; mais il n'empêche que parfois la colère est dure à maîtriser...

Bref 64 pages abominables et mal branlées.

Un exemplaire de disponible (sauf pour les lecteurs de ce blog) à 3€ dans nos bacs d'occaz de la rue Dante.

Je conseille fortement la dernière saison à tous les fans de comics : les derniers épisodes constituent une histoire complète Coon and friends puisant son inspiration chez DC, Marvel, Miyazaki, Lovecraft, Titi et Grominet...

 
Récurrence de la référence au héros à houpette dans l'univers de Matt Groening
 

Moulinbart

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Le coffret DVD de la 20ème saison des Simpson, avec un –s final en anglais, a connu une sortie anticipée en novembre afin de coller au 20ème anniversaire de la série animée de l’excellent Matt Groening. En savourant patiemment ces épisodes en haute définition, inédits pour moi, je fus surpris par une apparition improbable.

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Dans l'épisode 2014, Au nom du père, alors que les Springfieldiens se balladent en Irlande, Marge menace son fils aîné de le priver de lecture des Tintin qu’il semble tant aimer ! Une citation en forme d’hommage, un peu contre nature : non pas que Bart n’ait pas le droit d’apprécier  les aventures du glabre reporter belge (bien ça ne colle pas vraiment avec l’esprit du personnage), c’est dans le ton respectueux que cette citation détonne avec l’esprit satirique général.  

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En faisant quelques recherches (c’est à dire en tapant comme un lemming "simpson tintin" dans Google), on s’aperçoit qu’il s’agit d’une récidive. Le site simpsonspark recense une première référence à Tintin dans la saison 19 (images de gauche et bas)   épisode 1907,  Maris et lames.

J’ai calculé que le coffret de cette saison sortirait en France vers novembre 2013 !

Puis dans la 21ème saison (pas sûr que je vive assez vieux pour la voir celle-là) où il est carrément mis en scène assis à une terrasse parisienne ! Notez le manque de crédibilité de Haddock en buveur de Kawa.

Dans nos rayons vous trouverez sporadiquement des bandes dessinées de jeunesse signé Mister Groening, et beaucoup plus régulièrement des aventures de Tintin.

 
Métamœbius
 

Un beau gâchis

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L'exposition Mœbius à la fondation Cartier est très bien. On peut regretter le parti pris de la présentation à l'horizontale de certains dessins, ce qui oblige le curieux à littéralement ramper sur le pupitre pour pouvoir observer les détails des miniatures. Mais bon, c'est tout de même une visite très enrichissante. Le catalogue en revanche ne m'a paru ne contenir que du déjà-vu pour l'amateur, alors que l'expo présente un nombre incroyable d'inédits... C'est tout à fait regrettable. Aussi j'ai privilégié, en fin de parcours, l'achat du DVD du film qui était projeté au sous-sol. En effet après deux heures de visite j'en ai, en général, plein les pattes et j'ai plus envie de manger un cheeseburger et de boire une pression dans un digne estaminet tout en discutant des œuvres vues que de regarder un documentaire.

C'est donc chez moi que j'ai pu voir Métamoebius de Damian Pettigrew...

Grosse déception. Alors qu'il suffit de poser Giraud devant un micro pour qu'il se mette à raconter quelque chose d'intéressant sur l'art, les relations humaines, les voyages, la vie, alors qu'il suffit de le regarder dessiner pour vivre une expérience inoubliable, et bien ce film passe complètement à côté de son sujet.

Il semble que Giraud ait participé à l'élaboration du concept...  Un concept marrant sur le papier. Jean Giraud passe un casting pour un film d'un réalisateur imaginaire sensé provenir du Désert B. Or assister à des castings ou à des répétitions théâtrales est un vrai calvaire. Voir Mœbius s'adonner à cet exercice masochiste pendant de longues minutes est douloureux. Surtout quand on pense à ce qui aurait pu être fait, avec moins de prétention et d'attitude "arty". Le pire c'est que Pettigrew suit Giraud depuis longtemps, plus de dix ans, et qu'il a forcément en stock le materiau nécessaire pour faire un grand film sur Giraud, comme le Mystère Picasso fut un grand film sur le catalan. On trouve d'ailleurs un hommage au film de Clouzot dans ce naufrage qu'est Métamoebius.

Le film sur Gir/Moebius reste donc à faire. Espérons que le septième art ne passera pas à côté de ce qu'a si bien réussi la radio, en l'occurrence France Culture qui dès 1987 ou 88 consacra cinq ou six heures à l'artiste dans un excellent Le bon plaisir de Jean Giraud-Gir-Mœbius qui a marqué à jamais ma mémoire. France Culture encore qui, il y a deux ou trois ans, produisit sur le même artiste une nouvelle série d'entretiens, dans À voie nue, si je ne me trompe pas.

Toutefois je puis terminer sur une note positive. En complément de programme le DVD permet de voir du même réalisateur un documentaire plus ancien, Mister Gir et Mike S. Blueberry, qui montre Giraud à l'époque de la sortie du Blueberry Géronimo L'Apache et de la préparation de 40 days dans le Désert B. Ce film beaucoup plus simple et traditionnel dans sa construction est beaucoup plus intéressant. On y voit Giraud parler, dessiner, se mouvoir, et non débiter un texte abscons en faisant semblant d'être un mauvais acteur. Ces images ayant une dizaine d'années, on y retrouve un Giraud plus jeune que dans le film que l'on a vu préalablement. La constatation de ce décalage est poignante. Dans le visage ridé de Jean Giraud c'est notre propre mort que l'on peut regarder dans les yeux.

Métamoebius, DVD, 20€. Indispensable pour le fan, dispensable pour les autres.

Moebius TranseForme, exposition jusqu'au 13 mars 2011 à la Fondation Cartier, fermée le lundi.