Publications dans Juillet 2008
La mascarade de l'adaptation
 

Plagiat autorisé

Existant sur support vidéo, audio, voire en comédie musicale, traduit en 180 langues et dialectes, le Petit Prince de Saint Exupery est le livre français le plus vendu au monde. Peut-il décrocher le titre de celui le plus mal adapté en bande dessinée ?

La réponse est comparable aux chroniques Bd sur le sujet, insipide.

La vraie question reste celle de l'adaptation, son intérêt, sa nécessité. Artistique et fictionnel s'entend.

De fait aucune. Sauf à offrir aux inconditionnels de l'œuvre, à ses détracteurs, au consommateur, un nouvel objet de bavouillage, d'admiration éperdue ou de fiel incendiaire. Achat pavlovien ou polémique d’intelligentsia, les marchands du temple encaissent le cash.

Opposer à cette pale imitation, justifiée par le prétexte convenu du changement de médium, la sincérité de la transposition relève de la plus évidente lucidité esthétique. Au sens philosophique du terme.

Ici

Puis là

Suite du strip

Et envoi...

Fff'mur, Le génie des alpages tome 1, Dargaud, 1972.

 
PUNISHER Max n°6 : LE TIGRE par GARTH ENNIS
 

Récurrence de la figure eastwoodienne (annexe 7)

Le sixième recueil de le collection "MAX" du Punisher[1], contient 4 histoires. Les deux du milieu, scénarisées par Justin Gray et Jerry Palmiotti sont dispensables et assez ridicules. Le personnage de tueuse amazone sicilienne au charme eighties nommée Suspiria est particulièrement dur à avaler. En revanche ces produits médiocres sont encadrés par deux perles signée Garth Ennis, le scénariste qui n'aime pas les hommes au yaourt.

La nouvelle qui donne son nom au recueil, Le Tigre, est dessinée par John Severin dont nous parlions il y a peu. Excellente idée que de demander à un dessinateur né dans les années 20 de mettre en scène une histoire se passant dans l'enfance de Frank Castle, donc dans une sorte d'Amérique de l'ancien temps évoquant aussi bien Sur les quais de Kazan que les bandes de Will Eisner. Un encrage duveteux et une mise en couleurs intelligente (tramant les fonds de croisillons clairs) parfont l'atmosphère brumeuse de souvenirs ayant valeur de mythe fondateur. Si Garth Ennis date précisément la naissance de Frank en 1950 ("1960 : j'ai dix ans") le dessin de Severin évite de trop caractériser l'époque, conscient de la tension qui résulte à envisager un Punisher de... 56 ans[2]. En effet, le personnage du Punisher, par son passé au Vietnam, est cœur d'un des plus important problème auquel sont confronté les animateurs de l'univers Marvel, la vraisemblance historique et le vieillissement des héros...

The Cell, dessinée par Lewis Larosa, a retenue notre attention pour une raison dont vous commencez à vous douter. Ce n'est pas ma faute... Il y a encore Clint Eastwood dedans ! Au début, je me suis dit, ce n'est pas possible, je me fais des idées... On va pas recommencer. Et puis lorsque Stanley m'a emprunté mon bouquin pour le feuilleter et qu'il m'a glissé : "dis-donc, il serait pas un peu eastwoodien celui-là ?", mes réticences se sont évanouies : Oui c'était bien Eastwood qui jouait le Punisher.

Cette histoire carcérale, plongée dans les ténèbres, met bien en évidence les liens qui relient la mythologie du Punisher à celle des incarnations de Eastwood à l'écran. C'est tellement évident que jusqu'à présent j'avais omis d'en prendre conscience ! Un homme seul face au système. Un homme entre deux clans (ses ennemis se comptent des deux côtés de la Loi) . Une vengeance personnelle comme carburant. D'expéditives méthodes... voilà bien des caractéristiques de la figure qui a rendue Eastwood populaire auprès du grand public. Si l'acteur-réalisateur a toujours cherché à éviter tout excès de complaisance envers la violence alors que Garth Ennis aime se baigner dans l'hémoglobine et les tendons arrachés, comment ne pas établir rétrospectivement un parallèle entre les nuances qu'apporte Magnum Force au personnage de Harry Callahan[3] et la défiance du Punisher vis-à-vis de ses émules indésirables, dans la première et jubilatoire mini-série[4] que Ennis consacra au personnage.

Garth Ennis ne semble pas encore prêt à creuser autour des racines de ses propres fascinations barbares, pas plus qu'il ne montre l'envie de mettre en perspective les conséquences de la violence (a contrario du réalisateur d'Unforgiven) en cela ses héros sont plus bronsoniens qu'eastwoodiens. Toutefois, en l'occurrence, sa volonté de relier les actes du Punisher à son passé, son réel attachement au personnage et à son potentiel ainsi que son ardeur à en revisiter les mythes fondateurs, placent les deux récits évoqués aujourd'hui loin au dessus de ses habituelles bidasseries potaches.

[1] Panini France, 2007, 15€ .

[2] et oui, car The Tyger est paru au États-Unis en février 2006.

[3]Magnum Force (1973) de Ted Post, est le deuxième volet des aventures de L'inspecteur Harry. On l'y entend formuler cette fameuse phrase : "Je crois que vous avez fait une erreur de jugement à mon propos."

[4] En français cette série fut publié par Panini dans les 3 premiers 100% Marvel consacrés au Punisher puis regroupé dans un petit format moche mais pas cher distribué par Maxi-Livres : Un monde sans pitié, 2004.

 
L'art de la BD : John Severin, éditions Campus
 

Un vétéran discret

John Severin est un vieux soldat de la bande dessinée américaine. Né en 1921, il a surtout appliqué son talent aux récits de guerre et aux westerns, mais sa longue carrière le vit aussi œuvrer dans le fantastique, l'humour ou le récit de super héros. En effet, depuis les années cinquante son nom est associé à toutes les entreprises d'envergure dans le monde des comics : il était là au lancement des EC comics, au début de Mad, à la génèse de Creepy et Eerie... et au début des Marvel Comics de Stan Lee. Ainsi il travailla beaucoup sur Sgt. Fury and his Howling Commandos, la "jeunesse" de Nick Fury contre les nazis. Dans les années soixante-dix il encrait les dos musculeux de Hulk et de Kull The Conqueror (dans ce cas sur des dessins de sa sœur)... Mais le vétéran n'est pas resté sur la touche... Plus récemment on l'a vu retravailler pour Marvel — avec des scénaristes aussi tendance que Garth Ennis (Punisher - Max) et Ed Brubaker (Iron Fist) — et pour DC sur Desperadoes...

L'anthologie "L'art de la BD" que lui consacrèrent les éditions Campus en 1983 est assez orientée sur le genre fantastique, même s'il s'agit la plupart du temps de récits hybrides : westerns fantastiques, récits de guerre horrifiques, science-fiction humoristique... 7 nouvelles d'origines diverses nous sont ainsi données à déguster. Le dessin se déploie avec constance. Riche en détails,il ne néglige aucun élément du cadre, semblant appliquer à toutes choses la même attention professionnelle. Les effets sont dosés avec le soin culinaire du gourmet qui ne veut pas gâter la sauce d'une bonne intrigue par un excès de condiments.Toujours à hauteur d'homme, sa posture modeste peut parfois accoucher de planches ronronnantes quand l'histoire est faible (en l'occurrence la dernière du recueil) mais les personnages y sont toujours crédibles.

Cette anthologie de 66 pages, morceau compact de l'aventure du neuvième art, est un salutaire aperçu du travail d'un artiste méconnu, talentueux et discret. En plus chez nous il suffit d'un euro (1 € !) pour se l'acheter. Deux bémols tout de même concernant l'objet :

1) la qualité de l'impression en noir et blanc est nettement moins bonne que pour les précédents numéros de la collection, et ne rend pas hommage aux nuances de l'encrage qui utilise parfois des teintes intermédiaires, en lavis et crayon ou en trames...

2) les dates de publications originales, les titres originaux ainsi que les supports initiaux des nouvelles n'y sont pas clairement identifiées.

On parle aussi un peu de John Severin dans cette note postérieure :

Punisher Max n°6 : Le Tigre par Garth Ennis

 
Les clés du purgatoire
 

Délocalisation forcée

En ce moment précis, la porte de la boutique de la rue Serpente est close. Les lumières sont éteintes, les grilles fermées. Pendant ce temps, les promeneurs qui passe rue Dante peuvent me voir assis inconfortablement, tapotant le clavier de guingois. Comment est-ce possible ? Me serait-je trompé d'arrondissement ? Pourquoi suis-je dans le cinquième dans notre boutique de 20 m² plutôt que de siéger dominicalement dans notre domaine du sixième ?

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Par un concours de circonstances et de négligences cumulées on m'a transmis les clés d'un placard en lieu et place des clés de Serpente. Le fait que je n'ai à endosser qu'une partie d'une collective désorganisation n'est qu'à moitié réconfortant. Quelque part à Aaapoum on les problèmes qu'on mérite, comme en démocratie les dirigeants.

Always look on the bright side of life
: sans ces inconvénients m'ayant poussé à ouvrir Dante au lieu de Serpente ce charmant bambin qui passait là n'aurait pas pu se faire offrir un Batman par sa jeune mère (ou sa cousine, ou sa grande grande sœur, après tout j'en sais rien !)

 
Récurrence de la figure eastwoodienne (annexe 6) : théâtre d'ombres
 

Loveless de Brian Azzarello et Marcelo Frusin

Profitons de ce que, pour une fois, l'actualité des publications coïncide avec nos obsessions. Le début de la série Loveless a été traduit en français et publié il y a peu chez Panini. C'est une production du label Vertigo de DC comics. Connaissant l'inclination de cette collection pour le cynisme et une certaine pose adolescente, c'est sans surprise que l'on voit ce récit arborer fièrement sa filiation : le western des années soixante-dix, une fois qu'il a été mastiqué par Leone et Peckinpah.Blackwater, petite ville du Missouri, est la proie de fantômes divers en ces années meurtries qui suivent la guerre de Sécession.

Une armée d'occupation avec ce que cela implique toujours de vilenie, une troupe d'irréductibles dont la cruauté n'a d'égale que le racisme, un nuage de tensions et de rivalités locales et, pour couronner le tableau, un fils du pays qu'on croyait mort, qui s'entoure de mystères et semble venu savourer une vengeance à trois bandes.Azzarello ne se précipite pas pour dévoiler les ressorts de son intrigue.

Le rythme indolent qu'il obtient rehausse les séquences de violence et fait la saveur de ce récit. Néanmoins, faute de caractérisation plus subtile des protagonistes il n'est pas sûr qu'il parvienne à accrocher suffisamment la curiosité du lecteur. En ce sens il n'est pas aidé par le dessinateur, qui, s'il soigne parfaitement le découpage et l'encrage, ne parvient pas suffisamment à différencier les personnages, ni à leur accorder ce surcroît d'âme qui distinguerait cette œuvre des productions communes. Trop marqué par les figures leoniennes et par les lumières de Bruce Surtees et de Jack N. Green sur les westerns de Eastwood, en bref trop imprégné de clichés visuels appréciés du public, Marcelo Frusin ne voit pas les êtres humains derrière les costumes.

Jeu appuyé de références cinématographiques Loveless convoque évidemment la figure de Eastwood au sens propre. Deux personnages se partagent sa panoplie. Le héros vengeur, Wes Cutter, a gagné le poncho de l'Homme sans nom, le chapeau et la paire de colts de Josey Wales et la dynamite de l'Homme des hautes plaines. Le colonel Silas Redd a lui obtenu les traits de l'acteur et sa coupe de 1971. La tronche d'Eastwood était sans doute une référence inutilement appuyée, mais elle apparaît comme un aveu d'amour et est ici métonymique du western cinématographique en général.

Si les inspirations revendiquées de Loveless ont toute notre sympathie, on souhaite que par la suite les auteurs cherchent un peu moins à satisfaire les fans qu'ils sont et s'aventurent sur le terrain d'une création bédéïque plus ferme dans ses bottes, affranchie du cinéma.

Loveless tome 1 : Retour au bercail, de Brian Azzarello (scénario) et Marcelo Frusin (dessin), Panini comics, 2008, 13€.Lire également dans nos archives :Récurrence de la figure eastwoodienne : vanités des vanitésRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 1 : Black is beautifulRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 2 : Dans l'ombre du pistoleroRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 3  : L'oncle d'IrlandeRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 4: Blah BlahRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 5 : Jeunes talents Fnac 1999

 
harmonisation des horaires
 

3h d'ouverture en plus par semaine

Les plus fidèles d'entre vous auront remarqué qu'un nouveau camarade à rejoint notre équipe. Sous ses atours pacifiques et courtois il peut s'avérer redoutable. Il a ainsi failli, peu de temps après son arrivée, provoquer la mort d'une cliente... Mais ceci est une autre histoire. Ce qui importe ici, c'est que grâce à lui nous allons pouvoir étendre les horaires d'ouverture de la rue Serpente. Oui, elle n'était ouverte que 7 jours sur 7, ce qui vous en conviendrez est bien timoré en ces temps d'élan national du Labeur !

Les horaires de la rue Serpente étaient un peu compliqués... Ouverture à 11h, à midi ou à 14h en fonction des jours...  Fermeture à 21h, 22 ou 23h...

Pas simple, mais nous n'avions pas trop le choix.
Désormais ce sera plus clair et vous gagnez 3h d'ouverture :
Lundi et mardi de 11h (au lieu de midi) à 21h
Le mercredi s'aligne désormais sur les jours suivants (jeudi, vendredi et samedi) de 11h à 23h (au lieu de 22h)
Les horaires du dimanche ne changent pas : 14h (pour me laisser le temps de revenir de la messe) à 21h.