Publications dans Septembre 2014
RAIL'N'BD FEVER
 

Cyrillle Pomès reçut un bon coup de pouce critique en 2005 lors de la sortie de son tout premier album À la lettre près chez Albin Michel. Quelques articles fleurirent un peu partout à l'époque et les amateurs l'estimèrent sans tarder. Il faut dire que son récit lui était très personnel et qu'à la vingtaine, on lui trouvait une maturité certaine. En gros, la presse l'a bien mis sur les rails. Néanmoins une fois sortie de la gare de départ ?

Il revient en 2009 avec Chemins de fer qui, si j'en juge en creux par l'absence de traces restantes sur internet, fera l'effet d'un pétard mouillé. Pomès a pourtant peaufiné son récit pendant 4 ans. N'y a-t-il rien à en tirer?

Au contraire. Tous ceux qui sont passé à coté de Chemins de fer à l'époque et qui continuent de le faire aujourd'hui dans la boutique mériteraient de se faire botter le train. Ok, du coin de l'oeil l'objet peut paraitre tout à fait quelconque. Un marron peu pétant voire passe-partout, une couverture étonnamment sans couleur (tant mieux), un format peu inhabituel (bien qu'en fait plus longiligne)... Toutefois prenez la peine de tourner légèrement la tête vers l'album. Remarquez l'effort de placement des éléments de la couverture. Remarquez l'amour de l'affiche cinématographique qui en émane. Remarquez à quel point la scénographie de la couverture accompagne le coté fluet induit par les dimensions de l'album. Et vous noterez l'importance de l'absence de couleur après la lecture de l'album.

Il est très difficile de résumer efficacement l'intrigue de ce titre. En tout cas pour l'instant je n'y arrive pas de façon suffisamment palpitante et concise. La quatrième de couverture annonce fort correctement:

Dans une petite gare de campagne où il ne se passe jamais rien... une malle est abandonnée sur le quai. Ce qui intrigue Elias, le chef de gare. Ah! En ouvrant la mystérieuse malle, il devient subitement un témoin gênant pour la mafia! Et dans cette petite gare d'ordinaire si tranquille, descend une troublante jeune femme.

C'est surtout une énorme somme de petites choses bien agencées qui donne toute sa saveur à Chemins de fer.

le vrai trésor que tout le monde s'arrache?

le vrai trésor que tout le monde s'arrache?

Par exemple, Pomès ne comble pas ses espaces noir. Il rajoute par là énormément de matière à ses textures. Dans la même veine, il y a une énorme dichotomie entre la ville et la nature, à tel point que ses environnements agrestes sont souvent totalement dénués d'arrière-plan. On oscille alors mentalement entre la représentation difficile d'un beau ciel bleu sans nuage et celle du vide et du néant tandis que l'urbain devient abondant et touffu. Le travail d'ombre est palpable et apporte une grande force à une BD dont l'encrage donne pourtant des airs baclés aux yeux de certains aaapoumiens. C'est en fait dû à une impression calamiteuse. Certaines planches sont pixelisées. Emmanuel Proust, l'éditeur, devait avoir un gros train de retard au niveau des techniques de digitalisation....Pour en finir avec ce sujet, il est fort heureux que l'auteur n'ai pas autorisé une colorisation par défaut qui aurait rendu le titre beaucoup plus cartoon tout en gommant ses forces graphiques. Versons une larme pour L'incal.

Cette chanson de Jun Miyake est étrangement similaire au pitch de Chemin de fer. C'est très troublant.

L'effort de découpage, très visible dès le début, se poursuit ensuite plus discrètement tout au long de l'album mais reste très puissant. On sent ensuite lors du déroulement narratif et graphique beaucoup d'envies de bouleversements et de variété. Ça se traduit par certaines prééminences des effets d'onomatopées accompagnées de changements radicaux et répétés de cadrage, très efficaces.

deux bulles en plus et voila un méta train. Je ne peux pas croire que ça soit une coïncidence.

deux bulles en plus et voila un méta train. Je ne peux pas croire que ça soit une coïncidence.

La plupart des personnages ont d'élégantes gueules de Picasso. Pomès utilise pas mal d'emphase expressive tout en concentrant ses efforts sur les postures et statures. Son style évolue vite vers une maitrise plus subtile des courbes, notamment celles des visages (Un effet bleach moins dégeu). Il a peut-être parfois un peu de mal avec les tronches de truands mais... En fait non. Les plus moches sont les plus drôles. Et correspondent aux personnages les plus inoffensifs. Il y a une démarcation très nette et réfléchie entre les types de visage. Chaque visage dénote ainsi de la catégorie de caractère à laquelle son propriétaire (son porteur?) appartient. Pomès est très bon dans les tronches patibulaires et crée de la sorte une grosse rupture comique avec les petites canailles grotesques aux faciès de Pieds Nickelés. D'ailleurs le seul type de la bande des coyotes (les falots brigands) à s'accrocher à son banditisme, à prendre les choses en main et à tenter de renverser la vapeur est le seul avec une gueule dure, aussi effilée qu'une lame de rasoir.

Cyrille Pomès étant un homme très occupé, je n'ai pas pu savoir si il avait réussi.

Cyrille Pomès étant un homme très occupé, je n'ai pas pu savoir si il avait réussi.

Le Héros quant à lui n'en est jamais un car il n'y a ni héros ni personnage principal dans cette aventure chorale canonique.  On y croise juste des acteurs qui se baladent ou se font balader jusqu’à former un entrelacs subtil.  les nexi d’incorporation de nouveau personnages sont tous très différents et rafraichissants dans leur traitement. L'histoire complète est un entremélimelo d'aventures en tout genre aux paliers d'interactions efficacement intercalés.

La plupart des sous-fifres sont hilarants. Pas du tout des boute-en-trains mais justement... Il m'est d'ailleurs impossible de raconter içi les éléments du récit qui m'ont le plus fait rire sous peine d’empêcher fondamentalement que vous viviez la même réaction. Au train ou vont les choses, je risque de ne pas pouvoir m'en empêcher. De même, j'ai limité mon apport d'image au stricte minimum, ne choisissant que des cases plus génériques et évitant sciemment certaines pages pourtant terriblement excellentes. Tout ce que je peux révéler pour étoffer ce paragraphe énigmatique tient en quelques mots: cette bande dessinée peut vous prendre à contre-pied et les dialogues sont bien fendards.

Chemins de fer est dorénavant épuisé. C'est donc un objet rare.Chemins de fer est une histoire complète en un volume unique.  Vous ne peinerez donc pas à dégotter la suite.Le prix de Chemins de fer était inutilement élevé en neuf. Puisque nous le soldons, Chemins de fer en devient un ouvrage au tarif tout à fait dans la norme actuelle. Son achat ne devrait pas ébranler votre train de vie financier.

Enfin, sachez que je vais vous coller au train pour que vous l'achetiez.

Chemins de fer, Cyrille Pomès, 12€ au lieu de 19.90€, 86p pour 0.725g.

 
FALL OF THE HULKS/WORLD WAR HULKS
 

De la pénibilité du système éditorial marvelien.

Il est des arcs narratifs plus durs à lire que d’autres. Plus durs à dégoter, en fait. Par exemple, l’aventure utopia des x-men fut publié par panini en alternance dans le magasine x-men principal et dans le magasine Dark reign.

Les lecteurs fidèles des fascicules x-men ont dû faire preuve de beaucoup de vigilance pour ne pas louper ce rythme de parution incongru. Il leur aura fallu scruter avec attention le texte rébarbatif  qui sert effectivement d’annonce prévisionnelle en  conclusion du x-men numéro 159.

Les publications panini sont tellement bordéliques que ce long texte systématique et compliqué s’avère terriblement nécessaire et qu’oublier d’y jeter un coup d’œil ne serait-ce qu’une seule fois condamne régulièrement le lecteur à de très mauvaises surprises narratives (disparitions de chapitres, changement d’histoires…)

Dans la même veine, les 5 chapitres de l’arc narratif X-men VS vampires, aussi appelé la malédiction des mutants, furent publié dans la collection X-men univers… sauf le 4eme qui se retrouva en plein X-men extra. Vigilance!

Toutefois, ces deux séries correspondent  un peu au niveau un d’une échelle de difficulté éditoriale exponentielle.

Avez-vous déjà entendu parler de Fall of the Hulks & World war Hulks ?

Moi non plus, jusqu’à ce que je tombe sur un chapitre de Hulked out heroes qui voyait s’affronter violemment tout un tas de super héros débilisés et transformés en amas de muscles hulkiens (Thor, Spider-man, Deadpool, vous voyez le topo ?) Quel rapport? êtes-vous en droit de me demander. Les héros hulkifiés, en français, est en fait une ramification de la guerre des Hulks, un crossover discret qui précède de façon très intriqué la chute des Hulks. Ça n’est déjà pas super clair et ça ne va pas s’améliorer.

Pour comprendre ces crossover (et les lire convenablement) il aurait fallu que vous mettiez la main simultanément sur les:

Marvel Top 1 et 2, Marvel Stars 1 à 5, Marvel heroes V1 38/39 et Marvel heroes V2  1 à 6

qui ont tous été publié à la même période et qui se partagent de façon chaotique les chapitres des deux événements. Tout ça n’englobe même pas entièrement les histoires parues en anglais, passant par exemple à la trappe tout ce qui concerne She-Hulk seule.

Fall of the hulks est assez mal aisé à prendre en main seul, sans background. Les préludes aident assez peu: Le premier chapitre Fall of the hulks alpha, récapitule une certaine chronologie marvelienne en la réinterprétant du point de vue des magouilles de intelligentsia. C'est plutôt malin et intéressant mais ça ne nous prépare pas du tout au chapitre suivant fall of the hulks gamma, qui nous balance directement au cœur de conflits très poussés entre différents hulks. Il faut alors s'accrocher pour tout saisir (ou avoir lu tout Marvel heroes pour y trouver les prolégomènes). Puis commence pour de bon la chute des hulks. Il suffit ensuite d'accepter de mettre mentalement de coté les zones d'ombres liées à notre potentiel manque de culture au sujet des développements sociaux-relationnels super-héroiques récents pour apprécier un bon petit plan machiavélique. Mais ça peut perturber.

[learn_more caption="Ce qu'il peut être utile de savoir en préambule (cliquez)"]

Doc Samson est devenu méchant, manipulé par l'intelligentsia. Banner ne peut plus se transformer en Hulk (pour son plus grand plaisir?). Il a un fils nommé skaar, qui aimerait fortement tuer Hulk et qui se résigne à aider Banner le temps que la grosse chose verte réapparaisse.

Les deux cross-over dont on parle içi se passant après Dark reign, tout va un peu mieux dans le monde des super-héros mais c'est quand même pas jojo. Par exemple, Rulk (Red Hulk, le Hulk rouge) a défoncé l'héliporteur géant du shield. Tout le monde paye encore les pots cassés du règne maléfique d'Osborn.

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Vous avez en gros trois options de lecture:

- Vous pouvez lire Marvel Heroes d'une traite puis Marvel Stars d'une autre. Hulk rouge narre la première trame tandis que Banner est le protagoniste principal de la "relecture". C'est futé de la part des scénaristes d'opposer les points de vue des deux ennemis mais efficace seulement sur certains chapitres consécutifs.

- Vous pouvez faire confiance à la chaine de création du comic book (scénariste puis éditeur) et suivre le rythme de parution exact des fascicules. Vous alterneriez donc systématiquement (ou à votre convenance) Heroes et Stars. Vous suivriez les récits de Rulk et de Banner en parallèle, indépendamment des variations de temps narratif. Il arrivera que plusieurs chapitres d'une linéarité correspondent à un seul chapitre de l'autre. Il vous faudra alors stocker les informations qui arrivent trop tôt tout en régurgitant les souvenirs liés à celles qui arrivent trop tard, à l'instar des courageux lecteurs des fascicules à leur sortie.

-Enfin vous pouvez suivre le guide et tenter d'agréger toutes les péripéties de la manière la plus efficace possible, quitte à subir quelques flashbacks brutaux.

[learn_more caption="Pourquoi choisir de surmonter ces difficultés de lecture? (cliquez)"]

Parce que Bruce Banner est finalement ultra intelligent. Jusqu'à présent ça ressemblait plus à une rumeur. Il a toujours été relativement loin du canon marvelien du scientifique enfermé dans son labo (Docteur Pym en est le plus flagrant exemple ces temps-ci) mais uniquement car Hulk ne lui en laissait pas le loisir. Maintenant que Hulk s'est retiré de la scène et puisque Marvel ne connait aucun autre moyen de prouver l'intelligence d'un personnage, Banner se retrouve bardé de technologie et redevient l'inventeur de génie qu'il est sensé toujours avoir été. Pourtant en plus de ça, il semble faire preuve d'un réel intellect et d'une puissance de réflexion stratégique très nouvelle, assez détachée du mythe du laborantin habituel.

Ensuite, le plan machiavélique des vilains se déroule admirablement bien pour une fois, et on ne peut s'empêcher de se réjouir un peu pour eux.

Enfin, vous saurez enfin qui est l'Hulk rouge! L'identité de l'Hulkette rouge sera révélée dans la foulée et bien que ces personnages n'aient crée aucune problématique à suspens autour de leur alter égo caché, ça remet bien en cause leurs aventures et leur développement futur.

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La suggestion du chef:

-Marvel Heroes 38 puis 39-Marvel Heroes V2 1-Marvel Stars 1-Marvel Heroes 2-Marvel Stars 2-Marvel Top 1-Marvel Heroes 3,4 et 5-Marvel Stars 3,4 et 5-Marvel Heroes 6-Marvel Top 2

[learn_more caption="Cette valse a-t-elle au moins un sens? (cliquez, enfin!)"]

Peut être. Voyez plutôt:

Marvel Heroes 38 et 39 correspondent à un prologue qui débouche naturellement sur Marvel Heroes v2 numéro 1.Ensuite il vous faut absolument lire le Marvel Stars 1 (directement après le Marvel Heroes 1) sous peine de louper de nombreux éclaircissements nécessaires.Marvel Heroes 2 mène directement a l'arc Hulked out heroes mais poursuit une simili trame principale qu'il ne faut pas perdre de vue.Le retour a Marvel Stars 2 vous donnera tous les détails de l'action en cours (pré-Hulked out).Marvel Top 1 signe la fin de Fall of the Hulks: la mini série Red-Hulk revient sur tous les événements voilés ou détournements scénaristiques survolés puis introduit formellement World war Hulks.Après ce gros complément d'information qui arrive bien tardivement, il faut repartir à l'assaut de l'histoire en cours grâce à Marvel Heroes 3. On revient au moment scénaristiques précis ou Fall of the Hulks laisse place a Hulked out heroes et World war Hulks. Un petit résumé nous empêche de nous sentir trop bousculé par le rembobinage.Suivent Marvel Heroes 4 (pas d'alternance) puis 5.Marvel Stars 3,4 et 5 prennent le relai avec une digression soutenue sur l'identité du Hulk rouge (hooooo!)  puis Marvel Heroes 6 conclue Worls war Hulks dans une grande apothéose cataclysmique et un twist final révélateur.Marvel Top 2 nous propose enfin de petits affrontements annexes décalés des héros hulkifiés qui ont eu lieu environs entre Marcel heroes 3 et 4. C'est le moment de détente neuronale. Et pfiouuuuuu! Vos êtes arrivés au bout de ces cross-overs! Vous pouvez enfin envisager le futur des différents hulks avec sérénité!À la fin du chapitre inclus dans le Marvel Stars 5 apparait en gros la mention six mois plus tard sur fond noir. En fait ça n'a rien a voir! Ça correspond a une ellipse d'une histoire des secret warriors. Ne vous laissez pas surprendre.[/learn_more]

A l’heure où je publie ces lignes nous avons en rayon tous les arcs narratifs cités dans cet article, en pack d’occasion constitués avec courage, à force de persévérance et d’abnégation mais nous n’avons pas de stock. Cela signifie qu’une fois vendu, chaque pack ne réapparaîtra pas forcément tout de suite dans nos boutiques. N’hésitez donc pas à vérifier leur disponibilité auprès de nous si vous tombez sur cet article un peu tardivement.

Bonus éditorial ébahissant!

Ça, c'est du schisme sérieux.

Ça, c'est du schisme sérieux.

Juste pour s'amuser encore un peu, on va parler à nouveau de la parution des fascicules X-men.

X-men Schisme est un micro événement très important dans la chronologie des X-men.  Comme son nom l’indique, il préfigure une nouvelle ère X-men dans laquelle deux factions s’affrontent. Son incidence la plus importante apparaît lors d’Avengers versus X-men, le méga crossover d’après.

L’épicentre du plus gros tremblement de terre X-men moderne que représente Schisme fut publié en France dans le magasine X-men numéro 15 de mai 2012. Tenez vous bien.

Il était indiqué en couverture que Schisme comporterait 4 volets et que ce fascicule n°15 en était le premier. Sur la toute dernière page du numéro apparaissent deux informations totalement nécessaires mais quasiment voilées :Schisme se poursuivra bien dans le X-men numéro 16, qui sera donc le second volet de la saga. Toutefois, le bandeau de la preview  de la couverture de ce futur fascicule indique dorénavant un événement en 3 parties au lieu de  4. Ça n’est pas verbalisé, juste vaguement montré.

Ok, pas de changement majeur mais  une gestion déjà étonnante de l’évènement dans un même fascicule. Tout naturellement, nous sommes amenés à poursuivre notre lecture dans le x-men suivant, le n°16 dont la couverture indique bizarrement… 3 sur 3. Donc entre le n°15 et le n°16, il y a quelque chose que nous avons d’ores et déjà loupé mais qui ne nous a jamais été expliqué. Pourtant le sommaire du 16e X-men détaille les bons chapitres, ceux qui poursuivent directement l’histoire du précédent volume. Alors il n’y a pas de trou et pourtant il y a un trou ? Bon, tant pis, autant finir sa lecture, non ? L’histoire se conclue. Convenablement. Ouvrant les portes de la nouvelle ère problématique des X-men.

Réaction d'un lecteur.

Réaction d'un lecteur.

Alors Schisme ne serait finalement composé que de deux numéros, malgré l’annonce chaotique de 3 tomes et un second manquant ? Et bien non, car APRÈS la lecture de la fin de l’arc narratif (le 3/3) et dans un encart terriblement minuscule et discret, Marvel mentionne l’existence du X-men Extra n°90. Le résumé de ce numéro indique sans emphase  « deux récits complets dont l’un est lié aux événements du cross-over schisme ». Ça laisse entendre une « vague connexion », un « récit parallèle » ou même un léger addendum tellement la formulation parait je-m’en-foutiste. Pourtant dans ce minuscule encart, sur le minuscule aperçu de la couverture de ce X-men obscurément relié à Schisme, on peut voir en petit « Schisme 2/3 » ! Donc c’est bien à la fin du 3e volet de la série qu’on nous indique ou lire le second,  sur le dernier espace éditorial de la dernière page, en petit.  Et c’est  montré, pas même expliqué ni pointé explicitement du doigt. Juste négligemment  placé comme un élément sans importance. Je sens le responsable éditorial de Panini qui pouffe dans mon dos.

Vous avez tout bien suivi? Si oui, vous devez être un guerrier marvelien aguerri au mental d'acier. Si non, on peut toujours essayer d'élaguer tout ça en commentaires.

 
NOËL MAMMAIRE
 

Lorsque l’on bosse en librairie spécialisée "Bandes dessinées", on est en  contact avec de nombreux imaginaires. Ces imaginaires forment bientôt des Tout, avec leurs tendances, leurs évolutions et leurs regroupements.  On constate vite des similitudes. Puis on apprend à déterminer les origines sociales ou historiques de ces similitudes.

Une des choses qui m’impressionne le plus chez les auteurs de ce digne pays qu’est le Japon, c’est leur  façon d’assumer totalement leurs désirs et perversions. Petites filles, tentacules, les deux à la fois… Pas de limites. À côté, les fantasmes européens sont désespérément  fades et  banals. Notre érotisme se contente du vieux gangbang, de ce mythe de la femme qui aime surprenamment le sexe  et du sado-maso.

Au japon, donc, le désir est rendu visible. Et une des choses qui saute le plus aux yeux du lecteur masculin averti que j’imagine être, ce sont les nichons. Les japonais sont fana de gros seins. Plus spécifiquement de gros seins naturels. Ça transpire bien au-delà de leur production érotique ! Aucune histoire pour adolescent ne peut échapper à son lot de mini-jupes, de tension sexuelle et de grosses poitrines. Certains auteurs se sont même spécialisés dans cette opulence bustière, cette hypertrophie mammaire naturelle.

On peut notamment citer  Shouji Sato, dont toute la carrière est basée sur de gros nibards improbables dans des histoires non érotisés (Highschool of the dead : zombies/ Triage X : tueurs à gage)...

On peut aussi mentionner La paire et le sabre, une excellente série qui base son intrigue sur des techniques secrètes de réduction mammaire en plein japon féodal. L’héroïne de cette histoire aspire la poitrine de ses ennemies et l’absorbe, multipliant sa taille de bonnet à chaque fois, dans un monde qui octroie richesse et puissance aux femmes excessivement opulentes… C’est un peu la quintessence de leur vice pour les seins. Des seins, je le répète, totalement et illogiquement naturels. Tellement naturels qu’ils en deviennent extensibles et malléables à merci. Les lecteurs baignent dans cette incohérente physique de flambi qui en devient une simili norme.

Alors quand je vois une couverture comme celle-ci, d’un auteur  espagnol en plus, qui prend totalement  le contrepied de la vague dominante actuelle de tétasses, je le mets en avant. Mais oui ! Voilà un auteur non nippon qui assume ses fantasmes de seins siliconés. Bravo.

Le prisonnier des étoiles T2 est sorti en France en 1987. Je me souviens que dans les années 2000, les prothèses mammaires en silicone faisaient l’objet de nombreux débats de santé. On peut supputer alors que le pic de désir et de potentiel fashion du sein refait ait été atteint dans la décennie précédente. Alfonso Font est sûrement alors le produit de son époque, tout comme les auteurs japonais que j’ai cités précédemment. Mais tout de même. C’est fou cette dichotomie bustière. Et puis regardez-moi ce port de poitrine altier et fier. C’est une annonce en soit. C’est un auteur qui explique ce qu’il aime. Qui dessine ce qu’il aime.  Et qui aime les seins refait.

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La forme de la prothèse implique une saillie caractéristique du sein final et un positionnement dans l’espace différent.  Il est notoire que le sein refait ne tombe pas de la même façon que le sein d’origine lorsque son propriétaire gît sur le dos. C’est la même idée qui me pousse à affirmer que Font aime cette chirurgie esthétique. La qualité des prothèses de l’époque ne permettait pas un camouflage parfait du sein refait, qui n’apparaissait donc pas comme naturel, trop sphérique.  Font a donc utilisé cette imagerie imparfaite qui lui plaisait pour forger son héroïne. C’est tellement rétro et rafraîchissant dans cet océan mammaire informe et dégoulinant.

Enfin, à part ça, ce volume appelé Le dôme des plaisirs est en fait le tome 2 d’une série appelée Le Prisonnier des étoiles. C’est une histoire qui conclue la série, bien que l’auteur en eu sûrement voulu autrement. Il faudra juste accepter la possibilité qu'il n'y ait pas d'issue et que derrière un effet de suspens très répandu, il ne se cache que la fatalité de la vie. On peut très bien ne pas avoir lu le premier tome et tout de même saisir l’urgence de la situation des deux protagonistes spatiaux. Au pire, je suggèrerai bien de carrément nier l’existence de ce tome et d’envisager la lecture du Dôme comme celle d’un one–shot. Ça semble fonctionner. Ça rend l’apport de certaines informations assez abrupt mais un esprit ouvert ne peinera pas trop à les assimiler.

Je ne sais pas comment ni à quel point son style a évolué aux côtés de Carlos Giménez (avec lequel il a bossé quelques années en France avant le Prisonnier des étoiles) mais Font dessine plutôt bien de bout en bout (pour preuve sa maîtrise technique de la gravité d’une poitrine modifiée). En tout cas, il est aisé de faire le rapprochement avec son confrère-compatriote.  Font est présent dans plusieurs recueils de Tex et d’Akemi. Si vous ressentez de la nostalgie à sa lecture, ça doit venir de là.

Le vocabulaire d’une époque révolu émaille bien le ballottement des deux personnages principaux. Au fur et à mesure que l’intrigue avance, on pourrait presque faire basculer le récit de science-fiction à aventure tant l’ambiance s’y prête, tant l’environnement sans incroyables fantaisies technologiques peut nous sembler convenablement actuel. Font dépeint un futur qui tombe en morceaux. Un futur qui n’a pas réussi à être rutilant et à magnifier l’humanité. Un excitant mélange d’Hombre et de Valérian.

Le prisonnier des étoiles T2, vendu  avec un certain plaisir en pile rue Serpente pour 6€.

Je suis déçu, en tapant dôme des plaisirs sur google, vous ne trouverez rien de libidinal…

Je suis déçu, en tapant dôme des plaisirs sur google, vous ne trouverez rien de libidinal…

 
ELLES SONT BELLES MES BD ! PAS CHÈRES ! PAS CHÈRES !
 

Chez nous, la BD pousse bien.

Elle commence par une belle reliure qui à force de tapoter sur le coin d'un bac s'effeuille peu à peu. Là, le miracle de l'impression se fait et l'oeuvre se crée : les pages apparaissent pour de bon, les cases se forment etc. On saupoudre d'un peu de poussière, histoire que ça fasse vrai (un peu comme les cultures hydroponiques pour gonfler les tomates), on colle une étiquette dessus pour tenter de la vendre au bon prix... Bref :

Les 18 et 19 septembre, on sort les cageots !

Sur toute une sélection de BD cultivée avec soin, le kilo est à 1€. Un dixième de centime le gramme de culture.

Des bacs de vrac vous attendront pendant ces deux jours où la boutique prendra des allures de foire d'empoigne.