Publications dans Manga
Tensai family company
 

Les gênes généreux des génies

Lorsqu'on travaille chez Aaapoum Bapoum on est parfois témoin d'injustices si flagrantes que l'on tente de passer du statut passif à celui de justicier !

C'est pourquoi je vais vous causer de le série manga

Tensai Family Company

et de mon incompréhension à voir les packs s'accumuler alors que nous proposons cette très bonne série à un prix tout à fait raisonnable. 

Tensai Family Company

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(TFC dirons nous, même si ça ressemble à un nom de club de foot) combine les meilleurs éléments du genre shojo avec des ressorts comiques et burlesques très adultes. La dessinatrice dresse un portrait d'une famille recomposée réellement drôle et sincèrement touchant ; le tout brossé par un dessin au trait délicat qui esquisse avec légèreté le cadre domestique du Japon actuel. 

L'histoire est celle d'un jeune homme psychorigide au quotient intellectuel surélevé (oui comme S; du aaablog) mais victime d'un complexe de supériorité détestable (no comment!). Son nom est tellement compliqué que je dois user de la fonction copier/coller : Katsuyuki Natsuki.  

Cette graine de bureaucrate vit avec sa mère et l'aide à gérer ses affaires financières florissantes. Une belle harmonie mono-parental qu'un charmant écrivain hédoniste va troubler.

Car en plus de voir le cœur de sa chère maman ravi par le scribouillard, le héros se retrouve affublé d'un demi-frère brillant mais bordélique à l'extrême. Le syndrome Dany White et Brett Sinclair ? Oui il y a de ça dans TFC et même bien plus. 

Six volumes doubles constituent cette réjouissante chronique familiale, soit plus de 2000 pages vendus à 29 euros (contre 72 € à l'origine). Sachez enfin que la mangaka de cette série est aussi la génitrice du best-seller Nodame Cantabile!

Allez, on compte sur vous pour rétablir l'équilibre cosmique!

 
Offre : une affiche dédicacée des Jelly Beans
 

Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras

Un jour les Jelly Beans ont débarqué dans la boutique rue Serpente, nous ont offert leur CD, une affiche dédicacée et ont absolument tenu à se faire photographier avec Stéphane. C'était un peu étrange. Les Jelly Beans, ce sont deux japonaises qui semblent habiter à Paris et qui font de la musique pop japonaise, de la J-pop donc.

Le disque au début est assez agaçant. Mais bon à partir de la quinzième écoute on s'y fait (Alexandre le met souvent). Le plus drôle dans l'affaire c'est qu'en fait ces demoiselles croyaient être chez Kawaïko, nos charmants voisins un peu enterrés dans la partie sombre et étroite de la rue Serpente et qui vendent notamment du matériel pour goth-lolitas. 

Ayant bien profité de notre affiche indûment acquise, nous l'offrons désormais à qui la voudra...

Alexandre est assez fan et l'aurait bien emportée, mais de son propre aveu "si jamais je rapporte ça à la maison c'est le divorce, ma copine déteste... le Japon !".

Une synecdoque généralisante désignant les chanteuses en jupe à carreaux ?

Pour obtenir cette affiche il suffit de la demander. Il y a des petits bouts de scotch aux angles qu'il faudra retirer avec soin, mais sinon elle est bien.

Jelly Beans - Ishou Seishun

 
Sarutobi de Tezuka, éditions Cornélius
 

L'autre ninja

Malgré ses subtiles techniques de dissimulation, le nouveau Tezuka a été aperçu chez AAAPOUM BAPOUM !

Sarutobi raconte les aventures d'un tout jeune ninja indiscipliné et têtu. Sur fond de batailles historiques c'est une cavalcade emplie d'humour et de magie fondée sur d'innombrables illusions et métamorphoses...

Terrain idéal pour le médium bédéïque dont le vieux maître au bérêt explore toutes les possibilités comme le fera Gotlib un peu plus tard...

Cette œuvre date de 1960. 22 €, 336 pages.

 
Une idée pour un cadeau : Stratège de Hideki Mori et Kenichi Sakemi
 

Vu rue Dante, cette série jadis éditée par Tonkam :

Patrick Batman dit de cette série qu'elle est "riche, intelligente et sans temps mort". C'est vrai, c'est excellent. En plus c'est complet, fini, bouclé. Certains tomes sont très durs à dénicher désormais, ce qui est toujours un plus pour celui qui les a. En plus vous pouvez l'offrir à beaucoup de gens différents...

Votre père qui n'aime pas les mangas "sauf Taniguchi et Urasawa", votre ami rôliste en mal d'inspiration pour ses scénarios, votre grand oncle, militaire à la retraite, féru de Clausewitz et de Sun Tzu, votre petit frère qui en a assez de Naruto (euh... pas tous les petits frères en fait)...

On peut même offrir Stratège aux filles, car si on y parle constamment de guerre, le personnage central est un pacifiste et il a la vraie classe des Gnomes (comme Yoda, qui est si attendrissant).Convaincus ? Je vais pas vous raconter l'histoire en plus !!! Venez plutôt demander à Alexandre de vous en parler, ce gars-là est excellent pour pitcher les séries mangas.Dépêchez-vous on en a qu'un seul paquet (mais on a d'autres idées).

 
Gundam existe je l'ai vu
 

Par Stéphane

Travailler dans la vente a tendance à vous dépassionner. C’est triste mais c’est comme ça, les boulangers pâtissiers ne rêvent plus de bons gros gâteaux.

Parfois, néanmoins, un événement vous rattrape et fait rejaillir un élan de passion qu’on croyait évanoui. C’est fugace et enfantin, mais aussi très agréable. Ça m’est arrivé il y a quelques jours, assis devant la vidéo d’un Gundam de 18 mètres de haut, pivotant tête et dégorgeant fumée, les deux pieds bien plantés sur une verte pelouse tokyoïte.La vache. Je suivais ce projet un peu cocasse depuis son annonce, d’un œil amusé, voire même moqueur, imaginant les grands enfants immatures qui avaient réussi à convaincre des investisseurs à investir dans ce happening. Je regardais sur les blogs les photos qui jalonnaient les différentes étapes du projet et me gaussais intérieurement : « héhéhé, y’en a qui ne changeront jamais ».

Sauf que, avant-hier, ma bouche mastiquant un truc dont je ne me souviens plus la nature s’est arrêté à mon insu de mastiquer. Mes yeux se sont écarquillés et ma tête s’est penchée en avant. Des miettes ne sont pas tombées sur mes genou mais cela aurait pu, tant j’étais absorbé par ce spectacle redevenu, le temps que je retrouve mes esprits, exceptionnel.

Gundam donc, le robot géant que tous les amateurs d’animation japonaise connaissent, existe désormais. C’est le temps d’un été, à Tokyo, et ceux qui auront la chance d’assister à ce spectacle de visu, je les envie vraiment.

 
D-live de Ryouji Minagawa, éditions Kabuto
 

D-livrance

Je vais être franc : j’entretiens une relation assez perverse avec Ryouji Minagawa. Un « gangsta love » comme disent les américains. Depuis mon adolescence ce mangaka me supplicie, me tourmente et j’aime ça. A chaque fois, ma raison me dicte d’éviter son regard et chaque fois j’y replonge délicieusement.

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Tout à commencé lorsque Glénat édita les deux premiers tomes de Striker, un « actionner » au dessin bancal et au scénario d’une banalité affligeante… mais que c’était bon ! Voir un adolescent en tenue commando, épaulé par un loup-garou français,en train de dégommer un gamin au pouvoir digne d’un Tetsuo sous amphét’ dans Akira, est un spectacle fascinant. Cela a beau être bestial, régressif, Minagawa réussit à  flatter les mœurs les plus vils du lecteur le moins exigeant. Malheureusement la série fut stoppée avant de voir traduire le tome d’anthologie relatant le pugilat entre notre héros et le clone énervé d’Adolf Hitler. Tout n’étant pas noir, nous avons eu le plaisir de voir l’adaptation de l’œuvre en anime sous le nom de Spriggan produit par Katsuhiro Otomo (et dont le art book réside sur nos rayons)…

Quelques temps après, je me suis bâfré la série Arms chez Kana. Dans ces pages, la pauvre Alice de Lewis Caroll sert de prétexte à des combats titanesques entre humains cybernétiques et des légions de militaires bourrins de plus en plus retors… là encore on assiste à un divertissement jouissif. Seulement, avec ses 22 tomes au compteur, la lecture de Arms s’avère être une épreuve d’endurance qui rince son fan, au point de lui effacer quelques rams de mémoires. Du coup je m’étais promis de plus m’y faire reprendre.

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C’était sans compter sur les pépites agencées sous les tables de notre librairie… bien rangées en piles ; sur lesquelles prônent des étiquettes merveilleusement adaptées à leurs valeurs… les cinq premiers tomes de la série D-Live pour 10 € ! Si au Japon la série complète compte 15 tomes, seul le tiers a été publié par Kabuto. Cette ablation n’est absolument pas un problème chers lecteurs. En  effet le récit est découpé en autant de chapitres que d’historiettes finies. Du premier au dernier, on suit les exploits haletant de Satoru Ikaruga ; un adolescent de 17 ans appartenant à la mystérieuse organisation ASE. Son « pouvoir » : il est capable de conduire à la perfection tout véhicules à moteur (même un TGV un jour de grève). Ce don va être mis à rude épreuve par de nombreux attentats et accidents tous extrêmement spectaculaires... Le mot est lâché. Le reste est à découvrir par vous même. En conclusion si vous voulez prendre votre ration d’adrénaline pour 2€  partome, ne cherchez plus.

D’ailleurs je viens de lire un avis de fan sur le site manganews qui résume bien mieux que mon long discours l’engouement que Minagawa peut provoquer, je cite : "ce manga et juste super je quiff ce manga".

 
Ushijima de Shôhei Manabe
 

Homo homini lupus

Commencer un Ushijima avant de s'endormir et le finir au réveil est une expérience extrême qui peut être plus déprimante que de prendre le métro ou d'écouter les infos.  Ce manga combine deux regards : une vision froide et distante de la société à la manière d'un documentaire sur les glucides et un récit introspectif nous faisant partager le ressenti d'une partie de la population. Une partie seulement. Car l'humanité décrite ici se divise en deux : les prédateurs et les proies.

Or à longueur de volume c'est le point de vue des victimes qui vient hanter le lecteur en une avalanche de pensées affolées. De cette exposition peuvent germer deux sentiments qui se combinent subtilement : l'empathie et le dégoût. Les deux sont également dérangeants, soit que l'on se reconnaisse potentiellement dans cette incapacité qu'ont les personnages à sortir de leur ornière, à ne pas recommencer sans cesse les mêmes erreurs, soit que l'on se surprenne à être insensible à leur misère.

Si l'auteur nous donne à partager les affres des victimes,  les prédateurs (usuriers, proxénètes, banquiers, yakusas, truands de tout acabit) sont eux toujours présentés comme impénétrables et insensibles. Leurs pensées nous sont masquées. Leurs desseins nous restent mystérieux. Qu'est-ce qui les anime ? La cupidité, certes, mais pourquoi ? Quels sont leurs rêves ?

Description factuelle pour les prédateurs et focalisation interne pour les victimes : cette opposition de traitement expose efficacement la dualité de la société. Les premiers sont comme une meute et sont capables de s'entraider, de combiner leurs arnaques pour s'enrichir mutuellement sur la peau de leurs proies. Les seconds non contents d'être isolés, n'éprouvent aucune compassion pour leurs semblables. Cette vilenie ne les sauvera pas de la horde.

Outre la qualité documentaire habituelle à la série, qu'il s'agisse des subtilités des taux d'intérêts ou de l'exploration des diverses catégories nipponnes de losers, le tome 8 qui vient de sortir, resplendit par ses paysages urbains. S'ouvrent ainsi, loin de la Bourse, des espaces indistincts et périphériques, des non-lieux où des silhouettes humaines errent, dans une nuit perpétuelle ; désespérément seules.

 
Manga, 2008, Novembre 2008Commentaire
Opération Mort de Shigeru Mizuki
 

À cumuler les lectures en mode automatique, on glisse sur les images sans leur laisser le temps d’accrocher votre rétine, encore moins le cerveau ingrat qui s’abrite derrière. À cumuler les métiers dans le milieu du livre, l’on devient mauvais lecteur. Du moins mauvais lecteur pour soi, en ce sens que l’activité ne vous nourrit plus de la même manière. C’est un triste constat mais, ces derniers temps, je ne laisse plus les mots et les images m’imprégner, je ne leur laisse plus jouer leur rôle fondateur.

Si j’évoque ce gâchis, c’est parce qu’il arrive qu’une image surmonte d’elle-même ce marasme et vous percute de plein fouet, contourne votre passivité et vous réveille. Ces images, vous l’imaginez, ne courent pas les rues. Alors quand l'on en rencontre une, il faut la partager (plus encore lorsque l’on vend le livre qui l’abrite dans son magasin), histoire de lui dire merci pour le coup de semonce qu’elle vient de vous envoyer.

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Un soldat au corps grotesque explosant sous le coup d’une bombe, image si paradoxale dans son traitement de l’horreur qu’elle m’a tout simplement prise au dépourvu Au moment même où j’écris ce texte, et alors même que je ne l’ai pas sous les yeux, je revois cette tête catapultée en diagonale vers la droite, l’expression contrite de cet homme mort, le saugrenu d’un fragment de chair intact dénonçant l’absence d’un corps disparu ou disparaissant (on ne saisit jamais exactement la trame du temps lors d’une explosion de bande dessinée). Elle est venue enrichir tout un imaginaire sur la boucherie de la guerre que je me suis constitué à force de films, photos, et même bandes dessinées, en ébranlant par son audace comique la gravité graphique qui accompagne de coutume le sujet. Cela faisait longtemps que le spectacle de la mort ne m'était pas apparu aussi terrible, éreintant.

Pourtant, si elle fait sens d’une manière générale sur le sujet de la guerre, c'est plus encore pour ce qu'elle apporte comme éclaircissement sur l’imaginaire de l'auteur qu'elle m'a, dans un second temps, bousculé, appuyant sur son obsession latente pour le corps maltraité. Chez Mizuki, l’être explose, devient difforme et monstre, mais avec une gravité secrète et noble, sans épanchement. Le masque d’un trait simple, flirtant avec le grotesque vient volontairement désarmer  la souffrance qu’il y a à illustrer un objet mort mais encore mouvant, qu’il soit yôkaï ou soldat sacrifié sur le front pacifique. Je ne m’en étais jamais rendu compte, mais il flotte en permanence comme une mélancolie derrière son ode  joyeuse au fantastique, une ambigüité discrètement instillée dans sa modernisation du folklore. D’ailleurs, rien qu’à l’écrire, je me sens d’un seul coup idiot. Car que pourrait-il y avoir d’autre, dans cet empressement à populariser et moderniser les différentes expressions de la monstruosité, si ce n’est le désir de se sentir un peu moins seul, et un peu plus en phase avec son temps.

Opération Mort, sorti il y a dix jours, est nommée au prix du patrimoine au festival d'Angoulême, et en vente dans nos vénérables échoppes pour la modique somme de 27 euros. C'est dire si nous vous le recommandons chaudement.

 
MANGA MUSEUM
 

Par Stéphane

De passage pour trois jours à Kyoto, j'en ai profité pour visiter le Manga Museum. Ce n'est d'ailleurs pas vraiment un musée, mais plutôt une maison du manga, vivante et peu sacralisée, disposant de nombreuses bibliothèques et arpentée en tous sens par des cohortes d'adolescents déguisés, ou cosplayés comme on le dit désormais pour faire plus jeune. L'expo du moment était sur la bande dessinée à travers le monde, et l'on pouvait y découvrir un bon nombre de nos productions locales traduites en japonais. Un bien beau lieu, dont voici quelques clichés.