Publications dans BD européenne
L'écriture féminine et Persépolis
 

« Je ne crois pas à cette thèse selon laquelle les femmes écrivent différemment des hommes », a dit Marjane Satrapi dans une interview donnée à Michel Edouard Leclerc.

Tout faux ai-je envie de dire à cette charmante artiste qui me semble dès lors n’avoir qu’une vue limitée sur sa propre création. Comme tous les artistes en fait.  En effet, Persépolis fait montre de toutes les caractéristiques de l’écriture féminine reperées dans la littérature intime et les récits de vie. Après, si les théoriciens littéraires et poétiques inspirés par le "fait littéraire" ont faux, forcément moi aussi. Mais soyons positif et partons de l’hypothèse qu’ils ne disent pas que des conneries, et n'ont pas biaisé leur corpus. 

Cet article fait suite à une première analyse des couvertures de Persépolis

1) Persépolis et les théoriciens…

Partons déjà d’un constat : S’il est vrai qu’il n’est jamais évident, voire même pertinent, de traiter de manière théorique l’écriture féminine, dans la pratique, la critique littéraire trouve légitime de réunir dans un même volume des études portant sur des textes aussi différents que la Princesse de Clèves ou Le Ravissement de Lol V. Stein deMarguerite Duras, concluant qu’il existe une parenté que l’on ne trouverait pas dans les écrits d’hommes. Béatrice Didier, plus particulièrement dans ses études Le journal Intime et L’Ecriture-Femme, suggère à plusieurs reprises quatre inclinaisons chez la femme qui semblent admises par la critique littéraire moderne. Attention cependant, il ne s'agit pas de définir une essence de l'écriture féminine, immuable, mais plutot de comprendre si la condition de la femme, qui d'après ces critiques a une forme d'influence reconnaissable sur le processus d'écriture dans une majorité de cas, est visible dans Persépolis.

1.1)L’écriture intime masculine serait volontiers égocentrée tandis que l’écriture intime féminine serait davantage relationnelle. Les femmes se définiraient donc plus facilement à travers le canevas plus large de leurs relations aux autres, et non à travers une recherche introspective et une analyse de soi.

     1.2)Les «lignes de forces communes» qui permettent de reconnaître un écrit féminin proviendraient, au moins en partie, d’une certaine situation de la femme dans la société. Une situation fort variable certes, mais particulièrement pertinente dans le cas d’autobiographies célèbres telles que Marguerite Yourcenar, Gisele Pineau, Assia Djébar ou Leila Sébar…

     1.3)Néanmoins, l’écriture féminine semble presque toujours le lieu d’un conflit entre le désir violent d’écrire et une société qui manifeste à l’égard de la femme soit une hostilité systématique, soit «une forme atténué, mais plus perfide encore, qu’est l’ironie ou la dépréciation»

1.4)« les femmes aiment à écrire leur enfance» dit-elle, avant de développer que cette qualité leur a été bien souvent reprochée. Et qu’il existe deux obstacles au récit d’enfance encore plus difficiles pour la femme à surmonter : le dégagement d’un intérêt concret pour cette période de l’existence considérée comme futile, plus encore son souvenir ; et le courage d’aborder la découverte de la sexualité, plus particulièrement de sa sexualité et de son éveil.

Je crois sincèrement que l’on peut dire sans effarement que ces quatre caractéristiques de l’écriture féminine sont manifestes dans l’œuvre de Marjane Satrapi. Le récit d’enfance, l’éveil à la sexualité, la position de cette femme dans une société musulmane en voie d’intégrisme… sont autant de thèmes à l’origine de son introspection. Si dans l’autobiographie, l’écrivain homme est confronté avec ce qu’il a à dire ; dans Persépolis, Marjane fait, en plus de cela, face à la transgression religieuse fondamentale qu’est le seul fait d’écrire et de prendre la parole, à l’instar d’auteurs comme Assia Djébar ou Leila Sébar dont les œuvres autobiographiques sont toutes entières dédiées à ce thème.

2) Et le dessin dans tout ça…

Je pense que le dessin est la preuve la plus flamboyante de l’écriture féminine chez Marjane Satrapi (pas de commentaire facile sur féminité et simplicité svp). Ceux qui s’intéressent un tant soit peu aux autobiographies en bande dessinée auront remarqué l’égocentrisme marqué des auteurs, dans cet acharnement des hommes à créer une icône de soi détaillée, reconnaissable, et capable de produire un discours identitaire. Lewis Trondheim ou Art Spiegelman et leur anthropomorphisme ou le réalisme de Neaud… la stylisation est le moteur le plus pratique pour créer un personnage qui ressemble à soi, et qui parle de soi. Il n’y aucune de ces volontés chez Marjane. Sa représentation n’a pas vraiment d’autres sens que la représentation, de montrer qu’elle est là. Tout au contraire, elle exprime violemment le besoin des autres pour se raconter.

Et au lieu de charger de détail son visage afin que le lecteur identifie son personnage, Marjane préfère utiliser la case pour s’extraire de ses camarades voilées. Et ce dès la première page du premier volume, où ce que les critique appellent l’espace inter-iconiques (la bande qui sépare les cases) devient littéralement une ligne de démarcation. Plus loin, les scènes de foule, synthèse des bas reliefs iranien et du graphisme de l’enfance, permettent à son autoreprésentation simpliste d’être parfaitement identifiable tout au long des albums, sans jamais avoir recours à la stylisation égocentrique. Marjane ne se définit graphiquement que « par rapport aux autres ». Une démarche qui rejoint complètement les problématiques de l’écriture féminine comme celle de l’indétermination de l’enfant dans la plupart des récits d’enfance.

Entre spontaneïté et lisibilité des commentaires, pour une fois j'ai choisi la lisibilité. Une démarche généralement contraire au Blog. Mais une trop mauvaise communication entre Ronald et moi avait poluée le débat qui suit, intérressant. Du coup, j'ai coupé certains commentaires. Pas de censure, toutes les parties sont d'accord; les idées sont conservées mais c'est bien plus clair ainsi. J'espères que cela ne pertubera pas trop votre lecture.

 
Revue de presse : Hop ! n°109
 

Du sang neuf (jeu de mot pourri, je trouvais pas de sous-titre) !

Les exhumateurs de vieilleries et arpenteurs de greniers de la revue HOP ! consacrent leur couverture du numéro 109 (daté mars) à Carlos Giménez (dont nous avons récemment parlé dans la bibliothèque idéale).

À l'intérieur une notice biographique, une petite interview (6 p.) et une très complète (en tous cas elle dépasse largement mes connaissances !) bibliographie française. C'est un peu court mais faute de mieux... Comme le dit L. Cance dans son introduction Gimenez "est actuellement chez nous négligé par les médias spécialisés".

La revue Hop, qu'on croirait toujours fabriquée avec une vieille machine à écrire, de la colle et des ciseaux au fond d'une cave des années soixante-dix, coûte 7€60 et on peut la trouver dans toutes les bonnes librairies spécialisées de l'époque contemporaine.

 
Les couvertures de Persépolis
 

Puisqu'il va être question d'Art et de canasson, une très célèbre mais un peu longue citation de Vassili Kandinsky est de rigueur : "Le cheval porte son cavalier avec vigueur et rapidité. Mais c'est le cavalier qui conduit le cheval. Le talent conduit l'artiste à des hauts sommets avec vigueur et rapidité. Mais c'est l'artiste qui maîtrise son talent."

Par Stéphane

Avant de commencer à lire Persépolis, il peut être intéressant de s’arrêter quelques minutes sur les couvertures pour voir si ce dessin minimaliste est tant dénué de richesse esthétique que certains le disent (il parait que Marjane Satrapi dessine mal mais que ce n‘est pas grave).

Pour ma part, je vois dans l’alignement des quatre cavaliers plusieurs symboles qui attestent, au contraire, qu'elle dessine trés bien.

1- Le cheval :

Comme Bucéphale et Alexandre, ou Rossinante et Don Quichotte, nombreux sont dans la littérature persane les chevaux dont la présence auprès d’un maître prestigieux leur a permis d’atteindre une certaine notoriété (rien de réellement étonnant de la part d’un peuple dont la qualité des destriers est tant vantée). Voici un spécialiste, j’ai nommé Yves Porter dans son livre Chevaux et cavaliers arabes dans les arts d’Orient et d’Occident, sur lequel je m’appuie pour cautionner mes divagations critiques.

« Dans le contexte géo-historique de L’Iran, un héros littéraire, qu’il soit légendaire ou qu’il soit inspiré par un personnage réel, se doit de posséder une monture à son image, dont la constitution et le caractère complète ceux du maître. »

Tout est dit ou presque. L'utilisation en couverture du cheval, symbole fortement ancré dans la tradition persane, signale bien la revendication d’une filiation artistique et culturelle. Mais pas seulement, car en détaillant légèrement chacune des couvertures une à une, en identifiant des petits symboles précis, et en observant ensuite leur déplacement à l’intérieur de chaque dessin, on arrive aussi à déchiffrer la métaphore du cheminement intellectuel de la jeune fille iranienne vers la femme adulte multiculturelle (Qui suis-je ? Et comment je suis devenu Marjane auteur ?)(cliquez bien sur les images pour bien voir les détails évoqués...).Appelons ça...

2-...Les quatre âges de Persépolis:

La première couverture montre un cavalier iranien, la dague sortie au poing droit et le gauche levé en l’air. Très important : le cheval a une robe blanche et des jambes noires. Sur ces sabots, on remarque trois petits ronds. Il s’ébroue ; la charge va partir. Pour ma part, je vois dans ce dessin une allégorie de l’iranité naissante de l’auteur et le début de révolte qui l’anime dès son jeune âge. Une interprétation qui prend surtout du sens dans la comparaison aux couvertures suivantes.

La seconde couverture, le même cheval fonce maintenant au galop, le cavalier brandit son sabre pour attaquer. Evidemment, si l'on poursuit la lecture telle que je l'ai entamée, cette métaphore illustre alors l’adolescence de la jeune femme et la violence de la révolte qui l’anime à cette période.

La troisième couverture, période de l’exil en Europe, est très importante. Une nouvelle monture, à la robe toute noire et aux losanges sur les sabots, est montée par un cavalier européen qui semble appartenir à la garde prussienne. Il fait volte-face aux précédents chevaux et se dirige vers la gauche. Cette figure, en miroir des deux précédentes, est le signe qui permet d’attester la valeur allégorique du travail de l’auteur sur les couvertures (je ne suis pas fou!). Symbole de l’européanisation de Marjane suite à son séjour en Autriche, il fait front aux autres cavaliers, sous-entendu aux valeurs de son éducation iranienne, et attaque à son tour. C’est bien un combat entre influences culturelles qui est au cœur de cette suite de couverture, au coeur de la création identitaire d'une jeune femme écartelé entre Iran et Europe.

Enfin, la quatrième couverture et conclusion montre un cheval à l’arrêt, monté par Marjane elle-même, maintenant adulte et habillée sobrement. Les précédents chevaux, représentations métaphoriques de l’Iran et de L’Europe, ont accouché de ce nouveau destrier métis, à la robe iranienne blanche aux jambes noires, mais aux sabots européens recouverts de losanges. Le harnachement, emblème du mode de guidage, agrège les deux précédents pour former un nouveau modèle, mixte lui aussi. Mais Marjane ne l’a pas saisi. Sa monture est à l’arrêt, dans l’attente que la cavalière prenne les rennes.

Si l’on se propose de faire une lecture autobiographique de ces couvertures, ce que je fais évidemment, il n’est pas idiot d’y voir 1- La métaphore de la création identitaire, multiculturelle et même européo-iranienne pour être précis, de Marjane Satrapi. Un thème cher à la littérature francophone et en particulier de l’exil (deux caractéristiques que l’on trouve bien chez Marjane). 2- Un état de lieu sur la dernière couverture de ce qu’était sa vie avant l’écriture de Persépolis (rien de moins que le but permier de tout autobiographe vous me direz). Marjane, maintenant adulte, n'a pas encore saisi les rennes de cette double nationalité, enfilé son habit de guerrière (d'artiste) pour continuer l'idéal de révolution ou du moins de contestation qui a cours dans sa famille. Mais bientôt viendra Persépolis. Et dans l'écriture, Marjane déchaînera enfin le cavalier qui sommeille en elle.

la seconde partie de ses élugubrations cryptocritiques se trouvent ici

 
Dédicace de Baru
 

Par Stéphane

Baru est l'un de mes artistes de bande dessinée préférés. Alors même si L'Enragé est franchement décevant, et de loin son moins bon livre, je ne peux m'empêcher de publier une des dédicaces qu'il a réalisées chez nos voisins de la librairie Album. A ceux qui ne connaîtraient pas, jetez-vous sur la réédition des Quequettes Blues, L’Autoroute du Soleil, Le Chemin de l’Amérique ou même, dans une moindre mesure mais que de qualités quand même, Les années Spoutnik. Des beaux souvenirs de lectures.

(Suivre le lien Baru pour acceder aux titres).

 
Darwin & Davodeau
 

Par Stéphane...

  A l’occasion de la première diffusion télévisé sur Arte du Cauchemar de Darwin, documentaire émérite de Hubert Sauper sur l’introduction de la perche du Nil dans le lac Victoria, en Tanzanie, je remet ici une interview d’Etienne Davodeau que j’avais réalisée à l’occasion de la sortie de son livre Les Mauvaises Gens, autre documentaire émérite sur la naissance de la conscience ouvrière dans la région des Mauges. Elle fait un tiers de plus que celle publiée dans le Bulldozer N°1, n’est pas d’un grand intérêt mais pas vaine non plus (je suis un piètre interviewer je l’avoue).

N’hésitez pas à regarder le docu ce soir, et à lire le Davodeau, dont le cumul des prix et autres récompenses officielles a depuis attesté de la grande qualité du travail.

Parlez nous du film, vos sensations, vos sentiments, vos interrogations.

Le cauchemar de Darwin est un puissant moment de cinéma. On n’en sort pas intact. Les informations délivrées sont proprement sidérantes. Pourtant, jamais la forme n’est sacrifiée au profit du fond. Sauper tourne visiblement avec des moyens techniques modestes. Ce dépouillement sert son propos. Je pense par exemple à ces scènes de nuit où de jeunes enfants livrés à eux mêmes errent dans les rues. Les images sont presque illisibles. Mais cette quasi-opacité fait sens. La question de la beauté de ces images ne se pose pas, elle serait indécente. La question qui se pose est celle de la cohérence et surtout la nécessité. Cohérentes et nécessaires, ces images le sont. Devant ce film comme devant beaucoup d’autres de ce genre, je me demande toujours si et comment l’auteur parvient à se faire oublier les gens qu’il filme. L’omniprésence du matériel et de l’équipe de tournage me semble un handicap. Réaliser un reportage ou un documentaire en bande dessinée présente cet avantage précieux : rien ou presque ne parasite la relation entre l’auteur et le sujet!

Quelles sont les notions dans lesquelles vous vous reconnaissez, dans lesquelles vous reconnaissez votre travail ?

J’aime raconter une histoire particulière et concrète qui renvoie immédiatement à des questions et des concepts plus globaux. A priori, l’Européen bien nourri pourrait se contrefoutre de qui se passe sur les rives sordides de ce lac Tanzanien. Après avoir vu le film, c’est impossible. Sauper ne tient pas de discours idéologique, ni même économique. Il regarde.

À ma mesure, c’est aussi ce que j’essaie de faire. En dessinant Rural ! ou Les mauvaises gens, mon but n’est pas d’emmerder le lecteur, bien sûr. Encore moins de le distraire. Il s’agit de le toucher. De le concerner. Ainsi, plus le sujet de ce genre de livre est “ difficile ”, plus la qualité de sa narration est importante. Le sujet du film de Sauper est a priori totalement rébarbatif. Le film est passionnant.

Et Vous, comment concevez votre narration, vos formes et vos outils ?

Pour Les mauvaises gens, j’ai totalement improvisé le récit. C’est en alternant les scènes décrivant ce que me racontent mes interlocuteurs et celles où ils me les racontent, que j’établis le rythme du livre (je suis obsédé par la qualité du rythme de mes livres !). Par ailleurs, en quittant le traditionnel format 48 pages, carton, couleurs, on gagne une liberté considérable. On peut vraiment, si besoin, ajouter ou retrancher 10 pages au dernier moment sans que l’éditeur s‘évanouisse.

Vous êtes souvent à l’image dans vos livres docu contrairement à Sauper qui n’apparaît pas une fois. Mais curieusement, on vous sent plus effacé, plus humble aussi par rapport aux personnes à qui vous offrez la parole. Qu’est ce qui motive votre présence à l’image?

Je déteste dessiner le personnage qui “ me représente ”. Mais sa présence à l’image relève de plusieurs préoccupations. Il me sert de fil rouge narratif en établissant le lien entre les différentes parties du livre. Il me permet de rythmer assez précisément l’ensemble du récit. Rural ! et Les mauvaises gens sont par natures des livres très hétérogènes. Ce personnage remplit aussi une fonction unificatrice de l’ensemble. Il est aussi là pour affirmer le caractère subjectif du récit. En racontant la vie d’une ferme ou le parcours de syndicalistes ouvriers, je ne prétends pas raconter LA vérité sur le sujet. J’en raconte ce que j’en connais, et ce que je décide d’en raconter.

Quelle est la frontière entre appropriation d’un sujet et trahison ?

Connaître la réponse à cette question doit être bien reposant.

Êtes vous un artiste engagé ? D’ailleurs, que peut bien être un artiste engagé ?

Je peux difficilement faire abstraction de tous les paramètres qui régissent notre quotidien. Et je ne rechigne pas à aborder l’aspect politique des choses, car il est, qu’on le veuille ou non, déterminant. Mais être un artiste engagé, c’est soumettre son œuvre à une idéologie. C’est terrible et me semble inconcevable de nos jours. Désormais, le doute règne. Et c’est tant mieux.

Vous vous concentrez sur votre territoire, la France, un peu comme Michael Moore avec les Etats Unis. Hubert Sauper lui va scruter les pays étrangers comme peut le faire Jean-Philippe Stassen ou Joe Sacco. D’où viennent ces choix, ses impulsions ?

Les histoires dignes d’être racontées sont partout. Celles qui sont juste sous notre nez sont celles qu’on voit le moins. Elles attendent juste qu’on les ramasse.

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Cet automne, outre Les mauvaises gens, vous pourrez lire un récit que j’ai ramené du Japon, dans un livre collectif publié par Casterman. Ce n’est pas strictement un reportage mais une nouvelle constituée de ce que j’ai glané là-bas. Je n’ai pas d’intentions particulières dans ce domaine. Je n’anticipe rien. Il faut juste laisser venir, être attentif.

Alors quelles sont les choses qui attirent particulièrement votre attention? A quoi vous sentez-vous plus particulièrement réceptif ?

Je n’ai pas d’intentions particulières dans ce domaine. Je n’anticipe rien. Il faut juste laisser venir, être attentif. C’est une question de disponibilité. Bien sûr, les sujets “ sociaux ” m’intéressent.Mais je ne veux pas m’enfermer là-dedans (tu n’imagines pas le nombre de fois depuis la publication de Rural! où on m’a proposé de “ venir faire un reportage ” sur un chantier d’autoroute ou d’aéroport !). Je suis certain d’une chose : Chaque vie humaine est digne d’être racontée.

Vous travaillez maintenant autant sur le romanesque que sur le documentaire ? Comment choisissez-vous le genre avec lequel vous traitez chaque sujet ?

Pour résumer, ça se joue dès que le projet s’amorce : Si sa matière première est constituée d’une multitude de notes hétérogènes, comme c’est le cas le plus souvent ; ce sera une fiction.

Si un sujet suffisamment riche en lui-même s’annonce, ce sera un reportage.

Le film dénonce par une investigation féroce. Vous, pour votre part, vous installez en passerelle pour permettre le témoignage de tiers. Comment et pourquoi choisit-on sa place lorsqu’on le réalise un documentaire ?

C’est une question que je me pose en permanence ! Je n’ai pas là non plus de technique bien établie. L’énorme avantage que j’ai sur Sauper et ses condisciples, c’est que ma caméra à moi tourne en permanence!

Plus qu’une question de place, c’est donc une question de temps. Je parle avec les gens dont je veux raconter l’histoire. Éventuellement, je prends quelques notes (graphiques ou verbales) mais mon interlocuteur n’a pas sous le pif une caméra, un micro et un projo. C’est simplement une discussion entre deux personnes…

Avez-vous des modeles d’auteurs de documentaires ?

Les films de Ken Loach ont été importants pour moi. Par ailleurs, je lis beaucoup en ce moment les romans d’Hubert Mingarelli, dont l’écriture sait dénicher la vérité de l’objet le plus banal. En ce qui concerne la bande dessinée, Spiegelman et Tardi comptent bien sûr beaucoup. Les premiers livres de Sacco et ceux d’ Emmanuel Guibert aussi. Mais je ne suis pas un intégriste de la cause, j’aime plein d’autres genres !

Vous citez Spiegelman. Votre nouveau livre a ceci en commun avec Maus qu’ils sont tous deux des tentatives de comprendre des parents, et par extension qui vous êtes aujourd’hui ? Le documentaire est–il un moyen de se confronter à soi autant qu’au monde dont on veut témoigner ?

Il peut l’être de façon incidente. En réalisant Les mauvaises gens, je cherche aussi à comprendre comment le milieu dans lequel j’ai grandi a conditionné ce que je suis. Ces deux univers concentriques mais antagonistes (le milieu syndical et cette région réputée conservatrice) ont eu des influences positives ou négatives sur moi. Ce livre est aussi une tentative pour m’en libérer.

Que pensez-vous que la bande dessinée puisse apporter aux autres supports exploitant ce genre ? Qu’essayez vous pour votre part de mettre en place ?

Faut-il se demander ce que la bande dessinée apporte au reportage ou ce que le reportage apporte à la bande dessinée ? À titre personnel, quand j’ai essayé de caser Rural! chez un éditeur, mon ambition était de prouver que la bande dessinée était un média idéal pour ces « récits du réel ». Je voulais juste essayer ça. Ma démarche concernait d’abord la bande dessinée et ce qu’on peut faire avec ce langage et ses spécificités. Je ne veux rien mettre d’autre en place. L’accueil de Rural ! me permet de retenter aujourd’hui cette expérience avec Les mauvaises gens.

Si ce genre se développe en télévision, en cinéma, en littérature et en bande dessinée, c’est aussi une bonne nouvelle pour ça : mine de rien, dans ce domaine-là au moins, la bande dessinée occupe pleinement sa place, aux côtés d’autres genres narratifs. Pas si mal. Ne nous faisons cependant pas d’illusions. Sur les étals des libraires, ce genre de bande dessinée restera longtemps minoritaire d’un point de vue quantitatif. Mais elle nous procurera sans doute beaucoup de ces livres qui, la dernière page tournée, nous restent longtemps en tête. Il n’y a pas de classement hebdomadaire dans L’express pour ces livres-là. Mais pour chacun de leurs lecteurs, ils sont importants.

 
Pour guérir le Lupus.
 

Quelques pistes et notes de lecture en pagaille et à froid de AAApoum et BApoum (ne demandez surtout pas qui est qui, nous même ne le savons pas).

PS: les images arrivent bientôt, le temps de scanner.

1. couvertures


Et si le Lupus n’était plus une maladie de peau, mais une maladie de l’âme. C’est ce que semblent annoncer les couvertures des trois premiers volumes. Sur les plats, deux personnes, Lupus et Tony, Lupus et Saana, côte à côte. Immobiles, ils ne communiquent pas, et ne se regardent que rarement. Leurs yeux sont tournés vers un lointain inaccessible ; leurs pieds à chaque fois butent contre le bord d’un précipice, d’une rivière, de l’espace, qui semble les empêcher d’avancer, même d’un pas. Chaque nouvel album, nouvelle étape, consistera donc à traverser cet abîme, ce vide incommensurable qui sépare du futur tout comme de l'individu qui se tient à côté. Si loin, si proche.



Sur le quatrième plat des deux premiers volumes, un personnage vient rompre l’isolement du couple : Saana secoue sa serviette, Nyargance jette un regard inquiet vers le premier plat. Des éléments perturbateurs, dont chaque bousculade vaut mieux que l’isolement. Mais au dos du troisième album, personne, un lit vide, et c’est tout (symbole d’une sexualité impossible). La solitude, celle qui pèse comme une prémonition tout au long de l’intrigue, se rapproche. Mais quelle crainte imprègne Lupus ? La peur d’être seul, ou celle de se découvrir une aspiration profonde à la misanthropie ?

2. Frustration et communication



Lupus illustre bel et bien la difficulté à communiquer. Entre amis, entre parents, entre amoureux même pas amants. La mort de Tony marque la découverte puis l’échec dans le premier volume. A partir du second tome, plusieurs scènes illustrent la route vers un apprentissage de la parole. Parmi les plus comiques, notons par exemple le t-shirt réactif de Saana, qui répond à sa place en deux temps trois mouvements, parmi les plus tragiques, le vieil homme replié dans l’autisme qui retrouve un début d’activité laborieuse au contact de la jeune héroïne. Ce genre de symbole inonde la série, à vous d’en trouver quelques autres. Enfin, le troisième volume marque le retour aux sources du problème –station spatiale, lieu de la chute du rêve familial-, et aide à percer les origines de cette infirmité sociale. Un père sans visage, sans parole.





3. Métaphysique.



Quelque chose transcende l’Homme dans Lupus, mais quoi ? Est-ce le désert humain qui isole les personnages sur les couvertures, mais sert en même temps de refuge où échapper à l’écrasante civilisation ? Est-ce une Mère Nature aux multiples visages ? (D'un côté elle est étrange, inaccessible et inquiétante un peu comme celle d'Aldébaran de Leo,  une source d’angoisse pour l’Homme qui a rompu avec elle, d'un autre côté elle est riche, florissante et sexuée, source d’émerveillement et d’inspiration.  Elle est un bain sensoriel qui témoigne du mélange d’envie et d’appréhension devant la reproduction et les besoins primaires. La baise est une pulsion et une menace. ) Est-ce cet univers infini qui nous contemple depuis son obscurité, lieu d’angoisse et d’inconnu ? Ou est-ce enfin la vie, incompréhensible sujet qui discerne toujours un chemin détourné pour prospérer, quel que soit l’hostilité du milieu ? Ah la la, ce sacré Lupus et sa sexualité contrariée.

4. Résignation et optimisme : Lupus volume 4.



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Sur la couverture, Lupus est maintenant seul, le désert humain qui s’étend depuis les premiers volumes touche ici son apogée. Tout n’est pas sombre pour autant. Le sol ne se dérobe plus à ses pieds. Il y a un lac, et un passage de terre derrière qui augure la possibilité d’avancer, d’envisager le futur. Le jeune homme porte un costume cravate, au quatrième plat dépasse le nez de sa voiture, tout est dit.

Sans trop déflorer l’intrigue, qu’apprend cet ultime volume :

Le chapeau blanc qu’arborait fièrement Tony lors du premier volume appartenait à Lupus lorsqu’il était enfant. L’acte de la coupe de cheveux est chez Frederik Peeters le symbole d’un amour, et son résultat préfigure la réussite ou l’échec de la relation à venir (miroir de la scène dans les pilules bleues). La vie trouve vraiment toujours le moyen de prospérer, quel que soit l’hostilité du milieu (les quatre couvertures misent bout à bout résonnent). Le dialogue n’est pas le seul moyen d’expression (voire le travail de Peeters sur les vêtements et leur valeur sémiotique, et dire que tout le monde clamait que « l’habit ne fait pas le moine »). Enfin, note finale parmi les plus agréable : la famille n’est pas fatalement celle du sang, dixit le petit garçon au nez de son père, au yeux de sa mère, et au chapeau de… Lupus.

5. Références.


Lupus est nimbé de références multiples et variées, tournant tout de même pas mal beaucoup autour du cinéma de Kubrick. L’hôtel spatial vide et les errances du héros pourront faire penser à Shining, de même que les scènes au bar de la station ou Lupus seul dialogue dans le vide. L’espace infini et son silence, le reflet de la planète sur la vitre du casque de cosmonaute, la confrontation finale entre Lupus et son père, que l’on peut facilement considérer comme un double en plus vieux, sont autant de scènes aux échos de 2001, L’Odyssée de l’espace. Parfois, quelques images à l’intertexte symbolique apparaissent sur le robot télé -M le Maudit dans le troisième album, une que je n’ai pas été capable de reconnaître dans le quatrième (une BD à 5 euros offerte à ceux qui donnent la réponse en commentaire). Enfin, la promenade spatiale ou ouverture du volume 4 est un hommage comique aux aléas du capitaine Haddock dans On a marché sur la Lune, ne serait ce que par la proximité esthétique des combinaisons dans les deux séries.

6. Pourtant, sous le beauté du récit et la justesse de certains de ses thèmes…


… se dresse un discours parfois déplaisant. Car que dit l’histoire de Lupus si l’on s’attache à certains aspects du scénario.

6.1./ Tous dans le rang… La révolte ne mène nulle part et est l’apparat de l’immaturité. L’adulte, lui, ne cherche ni à fuir, ni à se révolter, mais fait la paix avec son destin afin d’être, sinon totalement épanoui, au moins à sa place dans l’ordre naturel des choses. Le monde, d’ailleurs, paraît beaucoup plus serein une fois ce constat accepté.

6.2./ Ce cheminement ne peut s’accomplir sans la réconciliation avec le père. Tony, on le comprend au début du quatrième opus, déprime non seulement car son père est mort, mais surtout parce cette mort laisse à jamais en suspend leur conflit et la violence de leur relation. C’est un être condamné au tourment et à l’exclusion qui entame le voyage avec Lupus, d’où sa mort peut-être, seule issue à un être qui n’a plus aucune chance de s’épanouir.

6.3./ Mais surtout, point le plus détestable dans Lupus, la vision de la femme selon F. Peeters, qui fantasme et établit des variations sur une figure bien connue des archétypes féminins, la « femme enfant ». Faussement forte, c’est par elle que le malheur arrive. Immature, emmerdeuse, capricieuse, manipulatrice, allumeuse et sainte-nitouche, dans le besoin constant d’être sauvée ou prise en charge par le sexe dit fort, et incapable d’assumer ses responsabilités. Ce personnage mérite des baffes à longueur d’albums, il faudrait lui dévisser la tête… Seulement, Lupus lui se complait dans son rôle de souffre-douleur, il se rachète une bonne conscience dans le sacrifice. Il ne couchera pas avec elle, ne vivra pas avec elle, il en fait son deuil et traîne sa rancœur et sa passivité pour notre plus grand énervement. Il se laisse utiliser et nous renvoie une image détestable, celle de notre propre situation d’impuissance de lecteur. Personne ne viendra nous aider, aucun Bertrand Cantat ne viendra dans la station corriger cette emmerdeuse et expliquer la vie à Lupus. Le seul qui aurait pu le faire s’appelait Tony et il est mort. D’ailleurs il n’est pas innocent de la part de l’auteur de faire coucher Saana avec l’incarnation de la figure virile et bourrue (le militaire) tandis qu’elle se refuse à la figure moins affirmée de Lupus. En bonne créature du Serpent, elle manipule les hommes et utilise le meilleur de chacun d’eux, sans s’impliquer réellement.C’est une vision sexiste de la femme (qui revendique d’ailleurs à haute voix les taches ménagères comme soulagement de l’esprit, alors que l’homme lui fait de la mécanique).

Par sa position centrale, et surtout par ses ressemblances avec le personnage féminin des Pilules bleues, elle semble incarner davantage qu’elle même. La tentation est forte de voir à travers elle ce que Peeters pense des femmes. Un constat peu nuancé les autres figures féminines représentées que sont les mères : protectrices, étouffantes, à la relation sans enjeu (seul le rapport au père compte pour Tony et Lupus), dans le dolorisme passif, et surtout au foyer… évidemment.

 
Les professionnels de Carlos Giménez
 

Une utopie fraternelle

par Vlad

Aux pires heures de la bande dessinée européenne l’œuvre de Carlos Giménez luisait comme un noir joyau, préfigurant les horizons nouveaux qu’allaient défricher une nouvelle génération lors de la décennie suivante.

Outre les chefs d’œuvre que sont Bandolero et la trilogie Paracuellos-Barrio-Muñecos, Giménez nous a légué les trois volumes impérissables de Les professionnels, sur lesquels je vais aujourd’hui m’attarder. Le dessinateur y relate la vie d’un studio de bandes dessinées dans la Barcelone des années soixante. Comme l’indique le préambule «Cette série ne prétend pas être une autobiographie (…) mais toutes les anecdotes qui s’y trouvent racontées sont rigoureusement authentiques». Il est évident que l’auteur puise directement dans son expérience vécue la matière de ses planches. C’est précisément en cela que sa démarche est novatrice et ouvre des perspectives pour l’avenir alors incertain de la bande dessinée. Certes, la prépublication dans Fluide Glacial impose un certain rythme, un certain format, la nécessité de chutes drolatiques et une bonne dose de salacité, néanmoins en s’affranchissant des exigences thématiques habituelles de l’humour et de la fiction et en se tournant vers sa propre histoire (qui fait d'ailleurs en partie corps avec celle du médium) Giménez fait un pas de géant. Rappelons au passage que son Paracuellos inspira alors Binet pour L’institution, qui demeure, à ma connaissance, la première autobiographie française, avant les Mune Comix de Menu, et les Approximate Continuum Comix de Trondheim.

Ceux qui ne connaissent pas encore le dessin de Giménez peuvent déjà saliver à l’idée de son noir et blanc précis, nerveux mais souple. Il y a des expressions humaines qui n’existent que sous sa plume. C’est un grand directeur d’acteurs. Grâce à son talent un dialogue peut s’étaler sur plusieurs pages sans être ennuyeux. Sur ses planches s’agite et discute toute une faune de personnages uniques et truculents, des tarés magnifiques tels qu’en décrivait Henry Miller dans Le tropique du Capricorne ou dans Sexus.

À travers la vie du studio «Creaciones illustradas» c’est toute la société espagnole qu’il nous décrit par effet de contraste. Entre le studio où s’activent jour et nuit les dessinateurs et l’extérieur où règne le franquisme se joue une opposition savoureuse. Le monde extérieur, pétri de respects des convenances, de religiosité et de moralisme, englué dans ses frontières et peu réceptif à la modernité trouve dans le studio son contraire. La communauté des dessinateurs, souffrant des mêmes affres quotidiens, et l’imaginaire, collectivement marqué par les paysages étendus de l’âge d’or de la bande dessinée américaine, forment un lieu où peuvent s’épanouir toutes les audaces, la pire régression infantile et toutes les impudeurs verbales et physiques. Une sorte de microsociété défouloir où chacun peut étaler ses frustrations sans aucun souci de la bienséance et de la respectabilité. Un lieu où les masques tombent. Un avant-goût de la « Movida » d’après la chute du franquisme.

Par ses récits, Giménez nous fait partager son humanisme un brin désespéré et nous laisse les clés de la survie dans un monde âpre. Ses personnages parfaitement humains (et en ce sens souvent capables des pires cruautés envers leurs compagnons d’infortune) laissent libre court à leurs pulsions dans le cadre d’une communauté, si ce n’est choisie, du moins consentie et dont le ciment est l’humour. Il y a là-dessous une utopie fraternelle telle qu’on ne peut la voir fleurir que dans les meilleurs films de prison. Un espace restreint où la camaraderie est le seul salut.

Ah… Au fait c’est surtout terriblement drôle, j’ai relu ce matin quelques passages, dont l’histoire intitulée La folle nuit. Après m’être bidonné tout seul j’ai couru à la boutique transmettre mon enthousiasme à Stéphane. Si jamais Arnaud-de-chez-Pulp’s-en-face nous fait chier on sait désormais comment tout ça va se terminer.

 
Le remake de Rock Mastard
 

Trois vies, une seule mort

par Vlad

Voilà un livre qui existe désormais sous trois formes. Pas de Deo Gratias pour Rock Mastard de Boucq et Delan a été publié une première fois en 1983 chez Futuropolis, dans une version en noir et blanc. En 1986 les éditions Bédéfil le rééditaient en couleurs. Cette année, le Lombard le ressort... Mais cette fois il a été entièrement redessiné par Boucq. Comme je ne suis vraiment pas convaincu par cette nouvelle mouture, je me suis amusé à la confronter à la précédente. Désolé, la vidéo est un peu longue (8 minutes)... Il faudrait vraiment que j'apprenne à parler aussi vite que De Caunes dans Rapido.

Ah... Au fait, il nous reste quelques exemplaires de 1986, à la boutique... Y'en aura pas pour tout le monde !

 
Quintos d'Andréas
 

Par Stéphane

Copyrignt Andréas/Dargaud

Les fans seront déçus, je le sais j'en suis un...

quelques infos supplémentaires dans la suite qui permettront d'entamer ensemble un débat.

Quintos est une parabole sur Guernica. Un thème trèsabordé, riche d'oeuvres splendides. Les principaux reproches que j'adresse à celivre, en plus d'être caricatural dans l'écriture de ses personnages, c'est :

- Pourquoi avoir changé le nom de Guernica ? Je n'y vois aucunes bonnesraisons?

- Pourquoi s'attaquer à un thème riche, historiquement, artistiquement, pour nerien dire de particulier sur le sujet ?

- Et surtout plus que tout, pourquoi tuer le célèbre et magnifique cri "NoPasaran", transformé en un vulgaire et anodin dialogue traduit. Il ne metni guillemet, ni rien. Il assassine le cri de révolte, l'étouffe et le noiedans le salmigondis sans valeur de ces élucubrations philosophiques sur la vie,la guerre, la mort. Des guillemets au moins, bordel.

En fait, je crois je déteste ce livre maintenant que sa lecture mûrit depuisdeux jours en moi. Ma haine pour ce manque de respect, même inconscient, pousselentement dans mon estomac.

La seule réponse que je trouve pour me soulager, c'est me dire qu'Andreas dansce livre nous invite à rejeter tous dogmes politiques ,et donc refuse l'idée duslogan, par nature fille d'idéologie.

Cela expliquerait aussi pourquoi Andréas, bien que ce plaçant son scénario dansle cadre réel de la guerre d'Espagne au printemps 1937 (date du bombardementdes civils de la ville Guernica), refuse de nommer la ville et lui trouve un pseudonyme.Guernica et son massacre sont depuis longtemps devenus synonymes d'un artengagé ; le nommer reviendrait à revendiquer un parti. Mais cette lecture,qui bien qu’elle ne me convienne pas me soulagerait un peu, ne trouve aucunautre écho dans le livre. Seul reste ce bain de considérationsmaladroites et naïves sur la vie.

J'aimerai vraiment en discuter avec ceux qui l'ont lu. N' hesitez pas à laisser vos commentaires