Publications dans Indés
Slip-pery slope
 

Hé bien, c'est le printemps chez les éditeurs ! Ils enchaînent les sorties qui font sacrément plaisir. En tout cas, chez nous qui n'avons que très peu de neuf mais qui en parlons beaucoup, il y a dorénavant une nouvelle poignée de titres indés sélectionnés avec soin et délectation parmi les nouveautés de nos petits chouchous. Ut, chez Mosquito, Sestrieres chez Çà et Là, Akasake en auto-édition, l’Exécuteur T2 chez Delirium, la Cantine de Minuit au Lézard Noir...

Nous n'aurions pas la place de tous les lister. Nous en serions presque débordés ! De tous ces arrivages, toutes ces piles à ranger, ressort toutefois une tête. Une tête et un torse. Une tête et un torse bien reconnaissables: ceux de Todd le géant.

Les premières pages donnent le ton.

Les premières pages donnent le ton.

Todd le géant est tout noir, tout immense et tout perplexe. Il fait face à un sacré problème. Il s'est fait chouraver son slip. Todd le géant est donc tout noir, tout immense et surtout tout nu. On comprend alors qu'il lui faille partir dans une quête proto-existentielle sur les traces des petits rouges qui sont sensés l'avoir subtilisé. Ce postulat d'une simplicité extrême, né du doux délire de départ d’Alex Chauvel, porteur d'une connotation originelle très enfantine, révèle très rapidement  un univers de fantasy alternatif de haute volée bien éloigné des sempiternels nains des profondeurs et autres hautains elfes. L'histoire est dense, le narratif infiniment bien construit et le minimalisme graphique achève de mettre au premier plan une inventivité globale terriblement rafraichissante.

Tout dans Todd est vecteur de candeur tout autant que de décalage. Les attitudes, les piques verbales, les réflexions, les concepts, les mythes, la faune, les rebondissements... Un escargot à l’évolution non darwinienne, une chouette amicale au langage fleuri, une mitose de nuage... Candeur éclatante, gentillesse sourde, décalage merveilleux servis par un gaufrier quasi immuable de 6 cases par page, limiteur et impulsion créatrice à la fois.

Même sans contexte, ça me semble à pouffer.

Même sans contexte, ça me semble à pouffer.

Il faut savoir à ce sujet que l'album fait 1008 pages (un beau petit pavé, donc) comprenant un total exact de 6001 cases. L'initié reconnaitra là le joli score (le joli record) des Carottes de Patagonie de Trondheim, dépassé d'une petite case de bon aloi. C'est bien avec ce nombre précis en tête que l'auteur s'est lancé dans son récit. L'album étant d'un format plus ramassé que les carottes, le défi est encore plus réussi. D'ailleurs, pour ne pas perdre en confort de lecture tout en évitant de détruire l'album à la moindre ouverture, l'éditeur a fait preuve d'une certaine audace en laissant apparente la reliure.

Pour décrire cet album, moi non plus.

Pour décrire cet album, moi non plus.

L'album est recouvert d'une belle jaquette qui lui confère une partie de son charme, se remise facilement et qui, une fois enlevée et donc protégée de toute dégradation, révèle un dos nu, cartonné d'aucune façon. Le jeu de collage et de couture des cahiers laissé ainsi libre permet d'éviter de casser l'album ou de marquer d'atroces et définitives pliures sur son épine dorsale. La surcouverture camoufle efficacement le tout lorsqu'il le faut mais ne subit pas la lecture du quasi-cube outre mesure.  L'album est souple, transportable et le lecteur peut se laisser porter par ses habitudes de lectures sans avoir à entrebâiller seulement sa BD pour sa préservation.

Devinez le nom des potes de Ringo ?

Devinez le nom des potes de Ringo ?

Todd le Géant qui s'est fait voler son slip entreprend un voyage à première vue étonnant et aléatoire mais rempli de sagesse et de bon sens. Quand toute une clique de personnages bigarrée prend la peine de poser ses réflexions, ça donne un récit qui suit un cours tranquille mais non sans tumultes. Todd est le récit du lent apprentissage et de l'éducation à l'acceptation de la notion vitale et inévitable de bouleversement. L'album distille une certaine sagesse de la résignation, philosophie positive lorsqu'acceptée pleinement et transformée en projet optimiste.

Todd repose tout autant sur une arythmie de prise de conscience que sur un jeu d'explications en tiroir intelligent et intrigant. L'auteur y plante puis y fait pousser des champs entiers de messages positifs auto-critiques réalistes mâtinés d'humour et d'un recul salvateur.

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Entre tous les jeux visuels discrets implémentés avec efficacité se nichent aussi une honnêteté et une fraicheur lexicale créatrice d'attachement et vecteur d'intime.  En résumé, Todd est une BD à la bienveillance rayonnante, qui nous en fait presque oublier les multiples hécatombes qui la parsèment.

Todd le géant s'est fait voler son slip, par Alex Chauvel, The Hoochie Coochie, 1008p, 25€. À retrouver dès sa sortie chez Aaapoum Bapoum

 
Du foutre plein les lunettes
 

Vous vous souvenez du dernier coup de cœur d'Aaapoum Bapoum ? Non ? C'est pas grave, on passe déjà au suivant.

La librairie Aaapoum Bapoum est un repère historique d'amateurs de viscères, de sensualité et du couple que peut former les deux. Les anciens se souviendront avec délectation des conseils éclairés susurrés dans nos coins sombres aux heures troubles de la fermeture prodigués par Patrick Batman, l'expert encore incontesté de la boutique. L'époque était à la découverte émerveillée de Maruo (entre deux haut-le-cœur) et à la délectation des premiers pas dans l'Ero-guro du lecteur lambda grâce au Lézard Noir.

Notre rayon Lézard Noir fait dorénavant notre fierté mais le tsunami se retire, nous laissant pantelant, moites et toujours en demande.  Comment payer notre hommage aux temps glorieux du défrichage décadent ? Comment retrouver ce plaisir de ne pas seulement conseiller un -dorénavant- mastodonte du genre? Comment retrouver ce petit frisson de l'underground beau, sale, délicat, dégradant ?

Yakuza Shunga, immense artbook sérigraphié paru aux éditions The Hoochie Coochie nous permit un temps de revivre ce magnifique moment de grâce. Au tirage ultra limité (120ex), aux couleurs chatoyantes et à l'imagerie jouissivement crue, l'album de 16 gigantesques pages nous rappela pour un temps notre amour de l'extrême visuel. Nous tachons de toujours conserver un exemplaire à votre disposition, bien que sa taille et son sujet nous poussent à le percher au plus haut de notre rayon érotique, mais les stocks s'amenuisent et nous savons fort bien qu'un jour, sa disparition sera définitive.

Fort heureusement pour les personnes à l'ordonnée faible qui ne pourraient l'atteindre en rayon, l'atelier  l'insolante nous propose de nous en mettre plein les yeux, au chaud, bien calé dans notre fauteuil de bureau tournicotant. Si cet aperçu vous met candidement en joie, n'hésitez pas à nous le réclamer.

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Passé cet album étonnant et précieux par la rareté de sa démarche d'hommage transgressif qui mérite toutes nos éloges, il ne nous reste guère plus qu'à revenir sur ces cotes déjà explorées, dans ces forêts maintenant bien défrichées du Furuya et du Kago.

Jusqu'à ce qu'apparaisse ce petit album erostreet-gore étonnant, Akasake, auto-edité à 200 exemplaires, imprimé en risographie et sujet principal de l'article (à l'origine). La riso est un procédé d'apposition des couleurs très similaire à la sérigraphie qui, beaucoup plus accessible, réussit très bien à l'artbook au papier épais et granuleux.

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L'auteur, Alexis Bacci, y mélange hallucinations japonaises dénudées, lascivité indée aux courbes souples et au trait contemporain, coïts folkloriques furieux, morbidité stylisée dans une volonté de transmission autant que de modernisation. Akasake est une petite pépite ultra léchée, parangon d'un indépendant vivant et réussi, qui réutilise, actualise, respecte, se joue de codes et de lignes de conduites qu'on aimerait voir un peu plus passer dans nos rayons.

L'ouvrage ne se trouve pour l'instant que dans quelques petites librairies indépendantes de bon gout (notamment chez nous notre révéré camarade underground du 6e arrondissement un Regard moderne ou à l'agréable librairie du co-éditeur la dimension fantastique). Il se fait donc assez rare en échoppe, se vent 20€ et nous en avons quelques-uns, gracieusement signés par l'auteur.

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Bonus! Existe en édition ultra-limitée de 50 exemplaires une affiche risographiée, numérotée et signée, tirage unique issu de l'album. Elle est en vente rue Serpente au prix de 15€. L’éditeur n'ayant pas prévu de réimpression, il faut réellement sauter sur l'occasion d'autant que nous sommes la seule institution à la vendre en dehors de la librairie de l'éditeur.

Se limiter à seulement quelques illustrations (parmi les plus soft) pour cet article étant une réelle torture, je vous propose d'aller jeter un œil à toutes les belles previews censurée (mais pas trop) disponibles sur la page facebook de l'album.

 
Le cadavre et le sofa - Tony Sandoval
 

Tony Sandoval produit beaucoup. Beaucoup d'illustrations que l'on peut retrouver avec bonheur sur ses réseaux sociaux; beaucoup d'albums aussi. Et Tony Sandoval évolue vers constamment plus de maitrise. Mais l'auteur n'est pas parti de rien puisque le Cadavre et le sofa, l'un de ses premiers récits paru en français, posait déjà toutes les bases, qu'elles soient narratives, graphiques ou imaginaires, d'un univers déjà en fin de gestation.

Polo est un jeune garçon que la campagne fait doucement gamberger. Il ne semble pas y avoir grand chose d'autre à y faire, de toute façon. Esseulé, désœuvré, on le comprend en quelques cases suffisamment différent pour que ses vacances se passent nécessairement en solitaire. S'installe ensuite dans son quotidien, le plus naturellement du monde, une énigmatique jeune fille à la beauté presque littéralement envoutante, Sophie. Rapidement les deux se rapprochent autour d'un sofa laissé à l'abandon et d'un cadavre en décomposition tout aussi livré à lui-même. Sophie va recréer Polo, sans qu'il ne s'en aperçoive, au cours d'un été baigné d'étrange et de métamorphoses.

Les auteurs humoristiques placent souvent le passage à l'âge adulte au moment précis de l'apparition tant attendue et célébrée du fameux premier poil pubien. Ils en oublient au profit du gag facile le fascinant et indéfinissable temps de maturation, sans réel début, sans réelle fin, duquel on ne prend conscience qu'après les faits. C'est à l'observateur de recevoir le privilège de l'analyse. Polo ne le sait pas mais il fait ses premiers grand pas dans le monde des futurs adultes. Nous ne le savons pas non plus, nous le devinons à peine.

À travers un ensemble de situations intriquées, parfois sans chronologie aisément mesurable, aux enjeux aléatoirement importants, Polo et nous sommes ballotés, le cœur vaillant et la peau moite, d'une toute petite révolution intérieure à une autre.  Désir, mort, oubli, inconnu, tout y passe avec fluidité. Tony Sandoval ne s'attarde toutefois jamais. L'été passe, la vie passe et si l’expérience d'un homme se mesure à l'aune de ses actions, alors c'est qu'il faut les enchainer, les multiplier, s'en servir pour bâtir discrètement les fondations d’expériences plus ambitieuses. À travers deux intrigues parallèles, porteuses de mystères et d'interrogations, de tragédie et d'occulte, les fondations de l'humain se dressent patiemment.

Polo a beau s’avérer le personnage central, puisque tout tourne plus ou moins autour de lui et de ses perceptions,  il est loin de se révéler le personnage principal. On pourrait croire que Sophie, antagoniste brulante, pourrait incarner le rôle. Non plus. Le cadavre alors ? presque. Le personnage principal, c'est le désir. Le désir charnel balbutiant puis frontalement épanoui, le désir d'autre chose, le désir de vérité, le désir d'ailleurs. le désir d'éternité.

À travers un jeu de couleur étonnant et une cohabitation aléatoire de différents styles aux portées radicalement opposées, Tony brouille les pistes manichéennes d'une intrigue aux relents fantastiques troubles. Très insistant sur une sexualité débridée, il délaye encore un peu plus les conventions sociales au profit d'un parcours initiation métaphorique qui ne prend son sens que dans la radicalité de sa singularité.

Si tout ça vous tente, rendez-vous en boutique ou sur notre site de vente pour mettre la main sur les quelques exemplaires encore disponibles, soldés à 9€ au lieu de 17.

 
LE SOUFFLE DU VENT DANS LES PINS
 

Malgré ma propension à batailler jusqu'à l'épuisement sentimental pour mes quelques coups d'amour, je me questionne toujours autant sur ma capacité à décrire, raconter, analyser ces titres.

Le Souffle du vent dans les pins par exemple est le dernier titre en date qui a piqué mon petit cœur d'esthète timide. J'ai bien envie de vous en parler mais il faut dire que cet album m'intimide beaucoup. Il est magnifique mais me revient-t'il d'y déceler des affiliations ? Suis-je seulement capable de dérouler le fil exact qui a amené à un tel récit sans pouvoir investiguer plus loin que le bout de mon nez pointant au bout de mon corps coincé au bout de ma petite chaise de libraire parisien ? Si je devais vous décrire la magnificence de ce récit, ne confesserais-je pas mon impuissance si je décidais en toute simplicité de vous en montrer les tenants graphiques ? De vous abreuver d'images plutôt que de mots ? Parce que décortiquer son trait sous ma plume ne lui ferait sûrement pas honneur, voici de quoi vous en mettre plein les mirettes:

Le point fort de cet album réside indéniablement dans cette claque oculaire. On ouvre le Souffle du vent dans les pins comme on ouvre une porte finistérienne , en s'attendant avec délice à ce que la bourrasque nous écarquille les yeux d'un brusque coup dénué d'animosité. Car comme le vent, Zao Dao (à ne pas confondre avec Golo zao) ne nous veut aucun mal. Comme le vent, sans plus qu'un sifflement, Zao Dao veut seulement nous emmener à sa suite. Et comme face au grands vents du nord, on se laisse aisément porter. Voilà le principe même de sa narration, voilà sa façon de paver le chemin de son personnage et d'emmener ses lecteurs à sa suite.

Nous voici alors en quête avec le personnage principal. Un pas après l'autre, une situation après l'autre, un instantané d'importance après l'autre.Le texte narratif minimaliste et sibyllin maintient cet état de voyage nébuleux, qui fait passer le récit d'aventure parfois épique à fable véritable.

Il semblerait que Zao Dao soit une sacré célébrité. Pas une pop star mais à l'instar d'un Kim Jung Gi devenu presque omniprésent ces temps-ci, une artiste dont le nom et le trait réveille bien des choses dans l'âme de spectateurs initialement bien loin d'être des afficionados de l'art graphique plus ou moins séquentiel. Pour preuve, je cite l'extrême facilité que nous avons à trouver ses dessins sur les portails généraux des plateformes tumblr et pinterest, hérauts de communautés geek et hipster autocentrés. Mieux, la rapidité à laquelle apparaissent ces deux sites lors d'une simple recherche internet sur l'auteur.

Un poil Matsumoto ou pô ?

Un poil Matsumoto ou pô ?

Yohan Radomski livre pour un site d'actualité français une interview de l'auteur très intéressante. M. Radomski vivant depuis maintenant de nombreuses années en Chine, il a le privilège de côtoyer des auteurs et de pouvoir les aborder avec un certain naturel. Ça nous donne une entrevue pleine de petites révélations. Voici en vrac ce qu'on y apprend d'important:

  • Zao Dao a 25 ans, c'est impressionnant.

  • Zao Dao est autodidacte. (Damnit)

  • Zao Dao s'inspire principalement de ses lectures d'enfance et des titres traditionnels au style marqué que ses parents lui ont transmis mais elle cite tout de même tous les grands auteurs marquants de sa génération. (Matsumoto, Otomo, Mizuki, Moebius...) En effet, certaines de ses illustrations font un fort écho à Matsumoto tandis qu'on aperçoit quelques monstres moebusiens dans ses carnets mais une rapide recherche google nous fait comprendre qu'elle ne mentionne pas négligemment Dai Dunbang.

  • Zao Dao n'est pas une artiste commercialement mineure. Son album s'est très bien vendu en chine malgré un précédent désaveu du marché face à son style. C'est une grosse surprise pour elle et une grosse réussite pour tous.

  • À l'origine, le livre est muet. C'est Mosquito, son éditeur français qui a insisté pour rajouter des pistes de lectures. On peut regretter le fait que ça perturbe le travail de mise en place visuelle de l'auteur, parfois jusqu'à gêner à la vision d'une très belle planche, mais on peut aussi concéder que ces mentions apportent un contexte parfois salvateur.

  • Zao Dao signifie "riz précoce". Voilà un détail qui vous resservira peut-être un jour en société.

À force d'enchainer les envolées vagues, je me rend compte que je n'ai même pas décris la trame du récit. Un hardcore fan pourrait m'envoyer au visage qu'il me suffit de flâner dans l'histoire et l'auteur elle même vous dirait qu'elle préfère vous impacter avec ses images mais tant pis, il manquerait quelquechose si je ne mentionnais pas ce qui habituellement fait toute la force d'un titre moins maitrisé. Pour 20 euros, pendant 117 pages, Yaya, un jeune garçon va voyager d'aventures en aventures, de rencontres en affrontements, de questions en réconforts. Au final, rien de plus à révéler puisque c'est la manière dont l'auteur nous dit son récit qui impressionne. Cette quête qui semble avoir pour but une affirmation de soi nécessaire permet à l'auteur d'amener son héros absolument là ou elle le désire en évitant la majorité des contraintes de cohérence habituelles.

Zao Dao multiplie les effets de styles en jouant sur de subtiles variations: changement du papier à dessin, changement de la proportion de couleur dans ses fresques, changement du pinceau à la plume, décors foisonnants puis grands blanc... Maintenues dans une bulle stylistique cohérente et complexe, ses planches se réinventent sans cesse. Un environnement modulable couplé à un découpage très illustratif nous balade dans un ensemble de photographies graphiques, saisissant au vol de fugaces moments englobés d’éternité.

Et pourtant il me semble maladroit de passer aussi vite sur les pérégrinations de Yaya. Permettez moi de vous citer son incroyable combat contre Rakshasa et ses sbires, sa rencontre fortuite avec une fée des montagnes, son doux rétablissement aux cotés de la fille de l'apothicaire et la fête célébrée en son honneur par moult villageois. Voyez qu'il s'en passe des choses.

N'hésitez pas à passer brièvement sur le site des éditions Mosquito pour de nouveaux aperçus de la maestria de l'auteur. Si je pouvais vous en montrer plus, je finirai par vous révéler l’entièreté de l'album. je vais donc choisir de m’arrêter là et d’espérer que toute cette apologie vous aura touché, vous poussant à aller chercher l'album dans une boutique quelconque (de préférence Aaapoum Bapoum tout de même) pour profiter du bonheur de le feuilleter physiquement.

À noter que la reliure des éditions mosquito tient admirablement bien puisque j'ai scanné une grosse partie de mon exemplaire à l'occasion de cet article, sans réel dommage. Autre point de précision, si ces scans rendent suffisamment hommage au travail de l'auteur, attendez vous à de grosses marges blanches autour de la majorité de ces illustrations. Un mal bien  inévitable puisque la racine du problème vient du format des illustrations elles-mêmes, tellement disparates qu'elles en sont impossible à compiler uniformément.

 
LA SÉLECTION D'ANGOULÊME ET NOUS
 

Cherchant un sujet et une idée pour réactiver cet espace d'écriture un peu moribond, j'ai pensé à Angoulême et au festival de BD qui va s'y dérouler une fois encore. J'ai relu les différentes listes des ouvrages sélectionnés et j'ai remarqué qu'en fait on en vendait pas mal. Ce qui est marrant puisque nous proposons très peu de livres neufs. Ainsi sur 57 livres en compétition (40 en sélection officielle, 7 en patrimoine et 10 en jeunesse – vous remarquerez que je mets de côté les sélections pour les prix trop officiellement sponsorisés par des entreprises privées) nous en vendons en nouveautés très exactement 10, soit 17,54 % si je n'ai pas oublié comment faire une règle de trois.

Comment interpréter cette belle adéquation entre nos orientations éditoriales et les choix du comité de sélection ?

  • Piste 1 : l'excellence de nos goûts est porté à un si haut niveau qu'il est fatal qu'un comité de sélection digne de ce nom retombe sur nos choix.

  • Piste 2 : bien que n'étant plus au comité de sélection, mon associé S; du aaablog qui y passa trois ans a laissé derrière lui le fumet de son esprit acéré, qui, malgré lui, continue à infuser et à influencer les membres actuels.

  • Piste 3 : comme n'importe quels libraires opportunistes, dès la parution des listes, nous avons passés de nombreuses commandes pour respecter les prescriptions angoumoisines.

  • Piste 4 : les méthodes de lobby de certains éditeurs fonctionnent admirablement dans certains microcosmes dont nous sommes un échantillon représentatif.

Je vous laisse trouver les réponses justes et explorer vos propres pistes et je vais vous présenter brièvement quelques livres de cette sélection, que nous vendons et que j'ai lu.

Arsène Schrauwen d'Olivier Schrauwen, L’Association.Nous avions reçu cet automne son peu loquace mais courtois auteur pour une séance de dédicaces.Arsène Schrauwen est une sorte de biographie délirante d'un aïeul de l'auteur. On y parle des colonies belges dans les terres exotiques et lointaines espaces imaginaires d'aventures fantasmées. Le personnage y part en quête de grandeur mais il croise surtout rapidement ses premiers véritables émois sexuels en la personne de la femme de son cousin, la délicate Marieke. Ce qui aurait pu être une aventure dans le registre de Tarzan ou de Out of Africa vire bientôt au cauchemar malsain cronenberguien. La différence entre les aspirations des protagonistes et la réalité devient abyssale. On suffoque, on étouffe dans une atmosphère claustrée et moite tandis qu’un peu plus loin le cousin s’enfonce dans la folie en quête d’utopie architecturale. Bref un très bon mauvais moment plein de féroce ironie (Arsène évoque parfois une version jeune de Blotch) servi dans une bichromie qui évoque des techniques d’impression oubliées.

Esprit des morts et autres récits d’Edgar Allan Poe de Richard Corben, Delirium.[button link="http://aaapoum.fr/boutique/index.php?id_product=467&controller=product" color="red" newwindow="yes"] en vente en ligne[/button]Aux clients qui le feuillètent et qui connaissent Corben depuis longtemps je précise toujours qu’il s’agit là de matériel totalement neuf et non pas de réédition de vieilles histoires. En effet cela fait des lustres que Richard est passionné par son illustre compatriote poète et il avait déjà adapté certaines des nouvelles ici présentées.Bien qu’elle soit numérique, je dois dire que j’ai bien apprécié la mise en couleurs de ces histoires initialement publiées aux États-Unis entre novembre 2012 et octobre 2014, contrairement aux gris de Ragemoor que j’avais peu goûtés.Le traitement est nerveux et sans chichis et les fins abruptes. Un bon condensé d’horreur et de grotesque qui parfois froisse l’œil fort à propos !

Les Intrus d’Adrian Tomine, Cornélius.

En écrivant, j’ai failli faire un lapsus et écrire « de Daniel Clowes », heureusement je me suis repris à temps et je ne passerais pas pour un beauf qui confond Tomine, Ware et Clowes. Car rappelons-le, Adrian Tomine ne montre pas du tout ici la moindre influence de ses deux compatriotes aînés !Blague à part, ce recueil contient des histoires courtes de qualité variée, mais les meilleures sont vraiment excellentes, avec un sens de l’ellipse fort appréciable à cette époque où si on ne met pas un panneau pour souligner chaque bonne idée elles passent souvent inaperçues ! Ce type fait confiance à ses lecteurs et ne les prends pas pour des demeurés. Comme Clowes quoi.

Chiisakobé T.1 de Minetarô Mochizuki, Lézard noirJe ne sais pas comment l’éditeur a fait pour faire parler autant de ce livre dont les qualités sont plutôt l’évanescence et la discrétion. Le dessin est très beau et lumineux, mais sans ostentation. L’histoire est plutôt douce et subtile, dégageant une sensation de sérénité alors que parlant de deuil et de reconstruction… et des difficultés d’une petite entreprise.On est curieux de lire la suite pour se faire un avis plus affirmé. Pour ça nous sommes chanceux puisque l’auteur sera en dédicace chez nous le 2 février et que le tome 2 sera à l’occasion disponible à la vente en avant-première.

Dans la sélection Polar sponsorisé par une entreprise de transport il y a Tungstène de Marcello Quintanilha (Çà & là), et ce titre aussi est bien, et nous le vendons et nous avions aussi reçu son auteur en dédicace. Pour moi ce n’est pas vraiment un polar, mais bon. Ça ressemble tout de même plus à un polar que le western Undertaker mais c’est plus une tranche de vie folle avec un retraité, un petit trafiquant, un super-flic, sa femme et deux braconniers dans une grande ville du Brésil. Le rythme est assez surprenant et les personnages sont bien travaillés. Alex en avait déjà parlé ici (lui il écrit que c’est un polar, alors peut-être que c’en est un finalement).Nous vendons aussi les titres suivants, présents dans la sélection, mais je ne les ai pas lu :

Neige rouge de Anneli Furmark, Çà & làMortelle vinasse de Mai-Li Bernard, The Hoochie CoochieUn père vertueux de Ludovic Debeurme, CornéliusCette ville te tuera, Cornélius de Yoshihiro Tatsumi, CornéliusLa maison aux insectes de Kazuo Umezu, Lézard noirBonnes lectures et à la prochaine, avant 6 mois j'espère.

 
NINA BUNJEVAC À AAAPOUM DANTE
 

Fidèles et moins fidèles, amis ou clients bienveillants qui ne passez pas tous les jours devant notre vitrine c'est à vous que je m'adresse, vous qui n'avez pas de compte facebook et qui fuyez twitter, vous qui venez de temps en temps sur ce blog pour savoir ce qui se passe chez nous...

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Nous recevrons donc Nina Bunjevac en dédicace dans notre librairie de la rue Dante le mercredi 25 mars 2015 à partir de 18h.

Outre l'excellent Fatherland (dont vous trouverez une description assez détaillée sur notre blog ici, si vous ne connaissez pas il faut absolument suivre le lien), nous vendrons aussi son Heartless(là dessus je n'ai rien à dire car je ne l'ai pas lu, je suis un peu comme Fleur Pellerin).

Si comme moi vous ne parlez pas bien l'anglais, sachez que son éditrice française Bérengère Orieux fera une interprète tout à fait convenable.

Pour avoir une dédicace le plus poli est de nous acheter un de ses livres. Ceux qui viennent se faire dédicacer un livre acheté ailleurs seront assez mal accueillis, s'il ne comprennent pas je ne crois pas que j'aurais l'énergie de leur expliquer.

Chips, bières, jus et fraises artificielles pour les autres.

 
FATHERLAND DE NINA BUNJEVAC
 

Même s'il s'agit d'un récit autobiographique, de Nina Bunjevac, on n'apprendra pas grand chose dans ces 152 pages. La Canadienne originaire d'un pays qui n'existe plus cherche surtout à écrire une biographie familiale et reste très pudique quant à sa propre histoire. Récit cyclique s'organisant autour d'une fracture initiale, Fatherland exorcise une douleur qui s'est étendue comme une tâche, et pour la comprendre il remonte aux arrières grands-parents de l'auteur. Cet acte relève certes de la psychanalyse familiale, mais ce faisant, Nina Bunjevac est aussi amenée à retracer l'histoire complexe et passionnante de la Yougoslavie. Ainsi que la cellule familiale dans laquelle est née l'auteur est déchirée entre deux continents, comme celle de ses grands-parents et de ses arrières grands-parents, on découvre aussi que les conflits yougoslaves ont été exportés jusqu'en Amérique du Nord. À la lecture de cette œuvre, j'ai d'une part vibré d'angoisse, mais j'ai aussi appris beaucoup de choses. L'idée que des ex-compatriotes s'entretuent à des milliers de kilomètres de leurs lieux de naissance est si fascinante... Cette complexité que produit la réalité manque bien souvent aux œuvres de fictions bédéïques.

Une façon de servir l'Histoire qui ne manque pas de sel.

Une façon de servir l'Histoire qui ne manque pas de sel.

Très instructif.

Très instructif.

Une touche d'humour.

Une touche d'humour.

Aucune famille n'est épargnée par la division.

Aucune famille n'est épargnée par la division.

Momirka, une grand-mère qui ne manque ni de caractère ni de cigarettes.

Momirka, une grand-mère qui ne manque ni de caractère ni de cigarettes.

Le cliché de l'illusion d'un bonheur.

Le cliché de l'illusion d'un bonheur.

Ce qui est bien aussi dans Fatherland, c'est qu'il y a plein de cartes, et que moi, j'aime les cartes.

Ce qui est bien aussi dans Fatherland, c'est qu'il y a plein de cartes, et que moi, j'aime les cartes.

Non ce n'est pas un extrait du dernier Robert Varlez de chez The Hoochie Coochie, mais bien une double page de Fatherland.

Non ce n'est pas un extrait du dernier Robert Varlez de chez The Hoochie Coochie, mais bien une double page de Fatherland.

Ci-après un petit feuilletage pour vous donner envie :Fatherland de Nina Bunjevac, éditions Ici Même, 152 p. N&B, couverture cartonnée, 24 €, traduction de Ludivine Bouton-Kelly, imprimé en France (bravo !). EAN : 9782369120087

 
ROCKWORLD
 

Rockworld est un OVNI incroyable. Et en même temps pas du tout car il est aisé de le situer par rapport à ses pairs.  Rockworld est une ode à la musique alternative underground hardcore. Et en même temps pas du tout, car la musique peut n’être qu'un prétexte. Rockworld peut n'être qu'un apparent subterfuge destiné à montrer la décadence tant sociale qu'auditive et en même temps pas du tout car comment monter un fanzine de cette trempe sans amour du son qui grince? Rockworld est amour et... HO LA VACHE, je crois que j'ai glissé dans une pub Tic Tac!

 A l'origine, Rockworld est un fanzine danois. Ça dissuade de le trouver en VO. Ses auteurs se nomment Søren Mosdal et Jacob Ørsted. J'ai copié-collé leur nom à partir du blog de The Hoochie Coochie dans le but avoué de ne pas avoir à me souvenir du raccourci clavier du o barré. (Par curiosité je suis quand même allé dégotter la combinaison, qui est Alt+0248). En tout cas grand bien m'en a pris car The Hoochie balance quelques phrases bien senties dans un texte rapide et efficace qui lève le voile entre autre sur les excellentes influences des auteurs.

Si je devais circonscrire le champ d'action de Rockworld pour les habitués de la boutique, je placerai en points cardinaux Ghost worldau Nord, Rockyau Sud, Billy Wild au Levant et Sophie(de Munoz et Sampayo) au Couchant.

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C'est cynique, aussi tranchant qu'un vieux rasoir trempé dans de la mousse de bière appliqué avec force par un homme qui convulse dans un remix orchestral de crissement de métal sur du verre. Le tout en plein brouillard d'alcool caillebottant.  Et de ce fait désespérément hilarant.

The Hoochie coochie a judicieusement combiné Rockworld, Noizeworld et Boilworld, les trois histoires qui composent  Rockworld dans son tout, en un seul album. Ça nous permet de profiter d'un album à la couverture très agréable au toucher, d'une quatrième de couverture tordante totalement déphasée grâce à l'absence d'imagerie et d'un shot d'underground incroyable étalé sur 6 ans d'évolutions graphiques et narratives manifestes.

6 ans, ça équivaut à 2 gestations du requin pèlerin et  à 44 ans pour mes carlins. Il peut s'en passer des choses, en 44 années canines. Mosdal en a profité pour, entre autres, s'affranchir de ses plus grandes sources d'admiration. Il quitte Muñoz dans l'idée et s'éloigne du rivage esthétisant de la technique pour voguer dans la houleuse mer de la puissance narrative par l'énergie et le mouvement.

Rockworld fait sûrement mouche car tout ce qu'on y perçoit s'assoit sur une troublante base de réel. Les auteurs (la quarantaine et quasiment tout autant d'années passées à battre le pavé branlant de l'underground danois) apprécient respectivement le rock et l’expérimental. Tout comme les personnages principaux, qui s'opposent ainsi tout du long du récit malgré leur amitié douteuse.

Vous pourrez trouver Rockworld mis en avant près de la caisse. il vous coutera 20€ et en échange, vous vous fendrez surement sévèrement la poire.

C'est encore un bruit de couloir mais nous tâcherons d'accueillir au moins le dessinateur en dédicace aux environs du FIBD d'Angoulême! Stay tuned!

 
DÉDICACE: COUPES À COEUR
 

Koren Shadmi de retour en dédicace aaapoumienne après l'excellent Abaddon.

 Il revient! La petite pépite américano-israélienne revient à Aaapoum bapoum après un silence radio d'un an et demi ! Nous avions acclamé son Abaddon puis avions eu vent de divers projets, la plupart encore en cours. Il revient le 20 novembre 2014 à partir de 18h avec Coupes à cœur, un recueil d'histoires courtes qui, à l'image de l'héroïne phare de l'album, est porteur de grands changements.

17,7 cm × 24,8 cm × 1,6 cm : son format est très Delcourt-ien. Ça soulagera à la fois vos étagères, après le très efficace mais un peu improbable format à l'italienne d'Abaddon, et le responsable de vos finances car le prix s'en trouve ajusté d'autant: 19€. Les tatillons auront remarqué qu'un Delcourt aurait couté dans les 15€. C'est vrai mais un Delcourt avoisine les 90 pages tandis que ce Coupes à cœur collectionne pas moins de 5 histoires pour un total de 134 pages.

Hé.

Mais fi de ces considérations techniques. Je ne pense pas être le plus à même à vous parler des différentes déconfitures amoureuses de ce recueil. Si Koren Shadmi choisi un medium visuel pour retranscrire ce dont il a envie de parler, je ne pense pas pouvoir faire mieux en paraphrasant verbalement. Ses histoires et ses peines sont profondément variées. Koren Shadmi a cette force de ne pas se répéter. Un crooner d'operette, un couple d'héroic-fantasy, un juif à rouflaquettes, une colocataire timide... Tout semble partir d'un cliché et dévier vers... l'inconnu trouble de la potentielle réalité. Le réel est imprévisible par nature, j'imagine. Koren Shadmi l'est tout autant.

À moins que...

Une idée rigolote est formulée dans la série de manga Baki : le principe de synchronicité. Elle est résumée en ces termes:

Quand de la matière, des êtres vivants ou encore des idées sans aucun lien apparent , se mettent à changer, en même temps, de la même manière, au niveau planétaire... c'est ce qu'on appelle la synchronicité!

Outre le bénéfice de m'avoir ancré Carl Gustav Jung durablement dans la tête, le petit texte explicatif de cette théorie me permet de comprendre, malgré les restes d'un petit sourire malicieux sur mon visage, comment à seulement quelques mois d'écart et donc selon un planning de création terriblement coïncidant, Koren Shadmi et Boulet ont pu sortir une histoire d'Heroic-fantasy du réel aussi similaire. Bien que fondamentalement différent dans le but, le propos, l'envie et le traitement (comme de juste) c'est tout de même très cocasse et troublant. Vous pouvez trouver l'histoire de Boulet dans le numéro 3 de la revue Papier du 04/06/2014 (ou la lire là...) et j'ai bien l'impression que je ne peux décemment pas vous en révéler plus.

Aussi ciselé que le titre.

Aussi ciselé que le titre.

Je n'ai pas l'ouvrage original sous la main mais je sais grâce à un détail qui me touche que Bérengère Orieux, l'éditrice et traductrice de Coupes à cœur a fait un excellent travail sur la langue. En effet, le titre anglais du recueil est Absent hearted, que l'on peut vaguement traduire je suppute par "sans cœur" (On me signale que c'est en fait plus complexe, basé sur un jeu de mot rappelant l'expression Absent minded, soit distrait).  Et se révèle alors toute la beauté de l'expression coupes à cœurs, dans une formulation très maline qui a la grande qualité de me rappeler les nombreuses parties de jeu de carte que j'ai pu vivre en famille tout en proposant un subtil jeu de mot qui ironiquement réchauffe le mien, de cœur.

La quatrième de couverture est aussi soignée que le titre et aussi bien composée que la subtilité du panel de destructions sentimentales contenu dans l'album.

La condition principale pour obtenir une dédicace est d'acheter un Koren Shadmi à la boutique. Vous n'êtes pas obligé de l'acheter le jour même: nous vous transmettrons un ticket de dédicace lors de votre acquisition. Toutefois, si vous vous présentez à la dédicace sans ce ticket, vous ne pourrez pas accéder à la table du dessinateur. Ne perdez pas votre sésame !

Vous pouvez, si vous préférez, demander une dédicace sur un tome d'Abaddon.

Les tickets ne seront cette fois-ci pas numérotés. Donc si vous arrivez tôt, vous serez sûr d'avoir une dédicace. Pas deux. Ou alors il faudra refaire la queue.

Que cela ne décourage pas tous ceux qui peinent à sortir du boulot à temps, nous savons d’expérience que Koren Shadmi est endurant et qu'il a la volonté de satisfaire ceux qui viennent le voir. Vos chances d'obtenir un dessin ne décroissent donc pas tant que ça en fonction de votre heure d'arrivée.

Bien entendu, si lorsque l'aube se lève il reste encore du monde attendant fébrilement, nous nous réserverons le droit de libérer le pauvre auteur et de mettre fin à la séance de dessin.

 
UN AUTRE BART
 

Depuis la rédaction de cet article d'annonce, nous avons fort heureusement pu lire Barthélémy et le moins que l'on puisse dire, c'est que Simon Roussin est en pleine période charnière de sa carrière.

Son style évolue drastiquement, délaissant les dessins au feutre chromatiquement chargés pour opter pour une inspiration ligne claire éclatante dans sa volonté de détournement.

Il y a beaucoup de choses à raconter sur Barthélémy, l'enfant sans âge, au moins autant que de choses à fantasmer à travers les nombreuses ellipses du récit et on compte bien sur Simon Roussin pour nous révéler ses motivations secrètes!

En résumé: Barthélémy est un vieil homme à l'agonie. Étonnamment, ce n'est pas son principal souci. Barthélémy a un problème de désespérance. Au sens Kierkegaardien du terme. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est la préface. En effet, Barthélemy ne peut point périr...

Lors de ses derniers soupirs, il se transforme invariablement en jeune garçon fringant d'une petite décennie et se voit donc obligé de continuer sur sa lancée. Encore et encore. Ça peut sembler attirant mais au bout de quelques milliers d'années, on se lasse de tout. Enfin ça, c'est surement parce-que ce Barthélemy ne doit pas être amateur de BD. On ne s'en lasse jamais de la BD.

Il semble tout au long du récit que Simon Roussin dévoie subtilement les récits de genres et l'aventure à la franco-belge (dont l'étendard serait par exemple un Théodore Poussin) pour l'amener sur le terrain glissant du sentiment de vacuité et de la conquête de sa propre mort, bouleversant ses but tout en pérennisant ses clichés.

Vous pourrez découvrir tout ça (et surement bien plus) le vendredi 24 octobre à partir de 17h. Pour obtenir une dédicace de Simon Roussin, il vous faudra impérativement acquérir un Barthélémy sur place.