Publications dans Cinéma
Whiteout de Rucka et Lieber
 

L'Antarctique : des machos, des tueurs, des traîtres et 180 jours de nuit...

Tandis qu'en Francobelgie les éditeurs arpentent le patrimoine littéraire pour le transformer en illustrés pour la jeunesse, de l'autre côté de l'Atlantique les Hollywoodiens transforment en films un nombre croissants de comics. Parfois, dans le second cas, le cinéma (ultime produit dérivé) offre une exposition accrue à une œuvre du neuvième art que le grand public n'aurait pas forcément remarquée  ("tiens la bédé du film !"). Ce sera probablement le cas de Whiteout, un respectable polar ayant pour cadre l'Antartique. Deux mini-séries scénarisées par Greg Rucka et dessinées par Steve Lieber, traduites en français en deux grands albums brochés, publié par Akileos en 2003.

Derrière une couverture  signée Frank Miller (une fausse bonne idée : le lecteur ainsi appâté refermant l'ouvrage avec la promptitude qu'entraine la déception de ne pas retrouver le maître des grosses semelles crantées à l'intérieur), le premier tome décrit l'enquête de l'US marshal Stetko sur un écheveau classique de morts et disparitions... Le cadre polaire est bien exploité, les dialogues sont bien tournés et le personnage principal est attachant dans le registre féminin qui ne se laisse pas emmerder. Cet Antarctique en noir et blanc tramé semble assez naturel et le découpage des scènes d'actions établit le bon équilibre entre les effets réalistes de confusion et la lisibilité nécessaire pour les apprécier.

La seconde histoire (Whiteout : fusion) confronte cette fois-ci l'héroïne à des mercenaires russes volant des armes nucléaires pour la mafia... En lisant récemment ces deux aventures, je me disais que le personnage de Carrie Stetko irait comme un gant à Clea DuVall s'il fallait lui trouver une interprète : même pugnacité, morgue, distance et équilibre intérieur incertain (oui, car en fait je râle à chaque fois qu'il y a une adaptation, mais je passe mon temps à chercher qui pourrait jouer qui, en bon geek que je suis : "Hé Stef ! Qu'est-ce que tu penses de Pierre Palmade en Thanos ?"). En plus Clea Duvall présente l'avantage d'avoir du charme sans ressembler à une fille de magazine. Parfaite pour le rôle donc, sans même évoquer les taches de rousseur.

Un petit tour sur le web et j'apprends, sans doute après la plupart de nos lecteurs, qu'un film est en "post-production". Sortie prévue pour 2009. Et non, ce n'est pas Clea. Ils ont choisi Kate Beckinsale, une actrice qui a un certain talent pour s'immiscer dans des navets flamboyants où elle peut incarner des guerrières vampires en cuir ou des décolletés de reine des gitans.

Je sais pas pourquoi, là,  j'ai l'impression que la subtilité psychologique des personnages va en prendre un coup...

Avant la soirée pizza de l'année prochaine, si vous avez envie de lire la BD et si vous passez chez nous, il se trouve qu'on en a quelques exemplaires.

 
PUNISHER Max n°6 : LE TIGRE par GARTH ENNIS
 

Récurrence de la figure eastwoodienne (annexe 7)

Le sixième recueil de le collection "MAX" du Punisher[1], contient 4 histoires. Les deux du milieu, scénarisées par Justin Gray et Jerry Palmiotti sont dispensables et assez ridicules. Le personnage de tueuse amazone sicilienne au charme eighties nommée Suspiria est particulièrement dur à avaler. En revanche ces produits médiocres sont encadrés par deux perles signée Garth Ennis, le scénariste qui n'aime pas les hommes au yaourt.

La nouvelle qui donne son nom au recueil, Le Tigre, est dessinée par John Severin dont nous parlions il y a peu. Excellente idée que de demander à un dessinateur né dans les années 20 de mettre en scène une histoire se passant dans l'enfance de Frank Castle, donc dans une sorte d'Amérique de l'ancien temps évoquant aussi bien Sur les quais de Kazan que les bandes de Will Eisner. Un encrage duveteux et une mise en couleurs intelligente (tramant les fonds de croisillons clairs) parfont l'atmosphère brumeuse de souvenirs ayant valeur de mythe fondateur. Si Garth Ennis date précisément la naissance de Frank en 1950 ("1960 : j'ai dix ans") le dessin de Severin évite de trop caractériser l'époque, conscient de la tension qui résulte à envisager un Punisher de... 56 ans[2]. En effet, le personnage du Punisher, par son passé au Vietnam, est cœur d'un des plus important problème auquel sont confronté les animateurs de l'univers Marvel, la vraisemblance historique et le vieillissement des héros...

The Cell, dessinée par Lewis Larosa, a retenue notre attention pour une raison dont vous commencez à vous douter. Ce n'est pas ma faute... Il y a encore Clint Eastwood dedans ! Au début, je me suis dit, ce n'est pas possible, je me fais des idées... On va pas recommencer. Et puis lorsque Stanley m'a emprunté mon bouquin pour le feuilleter et qu'il m'a glissé : "dis-donc, il serait pas un peu eastwoodien celui-là ?", mes réticences se sont évanouies : Oui c'était bien Eastwood qui jouait le Punisher.

Cette histoire carcérale, plongée dans les ténèbres, met bien en évidence les liens qui relient la mythologie du Punisher à celle des incarnations de Eastwood à l'écran. C'est tellement évident que jusqu'à présent j'avais omis d'en prendre conscience ! Un homme seul face au système. Un homme entre deux clans (ses ennemis se comptent des deux côtés de la Loi) . Une vengeance personnelle comme carburant. D'expéditives méthodes... voilà bien des caractéristiques de la figure qui a rendue Eastwood populaire auprès du grand public. Si l'acteur-réalisateur a toujours cherché à éviter tout excès de complaisance envers la violence alors que Garth Ennis aime se baigner dans l'hémoglobine et les tendons arrachés, comment ne pas établir rétrospectivement un parallèle entre les nuances qu'apporte Magnum Force au personnage de Harry Callahan[3] et la défiance du Punisher vis-à-vis de ses émules indésirables, dans la première et jubilatoire mini-série[4] que Ennis consacra au personnage.

Garth Ennis ne semble pas encore prêt à creuser autour des racines de ses propres fascinations barbares, pas plus qu'il ne montre l'envie de mettre en perspective les conséquences de la violence (a contrario du réalisateur d'Unforgiven) en cela ses héros sont plus bronsoniens qu'eastwoodiens. Toutefois, en l'occurrence, sa volonté de relier les actes du Punisher à son passé, son réel attachement au personnage et à son potentiel ainsi que son ardeur à en revisiter les mythes fondateurs, placent les deux récits évoqués aujourd'hui loin au dessus de ses habituelles bidasseries potaches.

[1] Panini France, 2007, 15€ .

[2] et oui, car The Tyger est paru au États-Unis en février 2006.

[3]Magnum Force (1973) de Ted Post, est le deuxième volet des aventures de L'inspecteur Harry. On l'y entend formuler cette fameuse phrase : "Je crois que vous avez fait une erreur de jugement à mon propos."

[4] En français cette série fut publié par Panini dans les 3 premiers 100% Marvel consacrés au Punisher puis regroupé dans un petit format moche mais pas cher distribué par Maxi-Livres : Un monde sans pitié, 2004.

 
Récurrence de la figure eastwoodienne (annexe 6) : théâtre d'ombres
 

Loveless de Brian Azzarello et Marcelo Frusin

Profitons de ce que, pour une fois, l'actualité des publications coïncide avec nos obsessions. Le début de la série Loveless a été traduit en français et publié il y a peu chez Panini. C'est une production du label Vertigo de DC comics. Connaissant l'inclination de cette collection pour le cynisme et une certaine pose adolescente, c'est sans surprise que l'on voit ce récit arborer fièrement sa filiation : le western des années soixante-dix, une fois qu'il a été mastiqué par Leone et Peckinpah.Blackwater, petite ville du Missouri, est la proie de fantômes divers en ces années meurtries qui suivent la guerre de Sécession.

Une armée d'occupation avec ce que cela implique toujours de vilenie, une troupe d'irréductibles dont la cruauté n'a d'égale que le racisme, un nuage de tensions et de rivalités locales et, pour couronner le tableau, un fils du pays qu'on croyait mort, qui s'entoure de mystères et semble venu savourer une vengeance à trois bandes.Azzarello ne se précipite pas pour dévoiler les ressorts de son intrigue.

Le rythme indolent qu'il obtient rehausse les séquences de violence et fait la saveur de ce récit. Néanmoins, faute de caractérisation plus subtile des protagonistes il n'est pas sûr qu'il parvienne à accrocher suffisamment la curiosité du lecteur. En ce sens il n'est pas aidé par le dessinateur, qui, s'il soigne parfaitement le découpage et l'encrage, ne parvient pas suffisamment à différencier les personnages, ni à leur accorder ce surcroît d'âme qui distinguerait cette œuvre des productions communes. Trop marqué par les figures leoniennes et par les lumières de Bruce Surtees et de Jack N. Green sur les westerns de Eastwood, en bref trop imprégné de clichés visuels appréciés du public, Marcelo Frusin ne voit pas les êtres humains derrière les costumes.

Jeu appuyé de références cinématographiques Loveless convoque évidemment la figure de Eastwood au sens propre. Deux personnages se partagent sa panoplie. Le héros vengeur, Wes Cutter, a gagné le poncho de l'Homme sans nom, le chapeau et la paire de colts de Josey Wales et la dynamite de l'Homme des hautes plaines. Le colonel Silas Redd a lui obtenu les traits de l'acteur et sa coupe de 1971. La tronche d'Eastwood était sans doute une référence inutilement appuyée, mais elle apparaît comme un aveu d'amour et est ici métonymique du western cinématographique en général.

Si les inspirations revendiquées de Loveless ont toute notre sympathie, on souhaite que par la suite les auteurs cherchent un peu moins à satisfaire les fans qu'ils sont et s'aventurent sur le terrain d'une création bédéïque plus ferme dans ses bottes, affranchie du cinéma.

Loveless tome 1 : Retour au bercail, de Brian Azzarello (scénario) et Marcelo Frusin (dessin), Panini comics, 2008, 13€.Lire également dans nos archives :Récurrence de la figure eastwoodienne : vanités des vanitésRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 1 : Black is beautifulRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 2 : Dans l'ombre du pistoleroRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 3  : L'oncle d'IrlandeRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 4: Blah BlahRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 5 : Jeunes talents Fnac 1999

 
Récurrence de la figure eastwoodienne (annexe 5)
 

Jeunes talents Fnac 1999

Depuis l'ouverture de ce blog je me suis donné une tâche : recenser les apparitions de Clint Eastwood dans la bande dessinée et jeter les ébauches d'une analyse de l'utilisation de cette figure. C'est ma mission, je dois la mener à bien, quand bien même je n'aurais pas grand chose à dire de certains des objets qui passent sous mes yeux.

Ainsi ce Rue Watt issu d'un concours lancé en 1999 par les Fnac d'Île-de-France. Il s'agissait de découvrir de jeunes talents... Aux participants étaient soumis un thème, le polar, et une phrase "Rue Watt, 31 décembre 1999, il pleut, une ombre passe...". Passons sur la banalité de l'argument, après tout les sujets de rédac' ne sont que des prétextes, et concentrons-nous sur l'objet primé, donc édité, puisque tel était l'enjeu. 3 feuilles A3 pliées en deux et agrafées, celle servant de couverture étant plus épaisse, merci. 8 planches de BD donc. Passons également sur le caractère pingre du mécénat fnacquien pour nous attarder sur ses conséquences. Le scénario élu, écrit par Laurent Benosa, semble avoir été conçu pour s'étendre sur une pagination plus proche d'un "roman dessiné" à la (A suivre...) que d'une nouvelle.   Résultat :  à force d'être elliptique l'histoire en devient obscure.

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Dans un noir et blanc synthétique, entre ténèbres et surexposition, Olivier Georges dirige correctement son petit théâtre sans parvenir à dépasser la rigidité de ses sources photographiques. Un défaut propre à de nombreux débutants dont il est malaisé de se départir. Au moins le lauréat arrive-t-il ainsi à produire un Clint Eastwood ressemblant (dans près de la moitié des cas). Curieux choix, néanmoins, que de recourir aux traits du célèbre Américain pour incarner "Cosme Vilard", un ancien de l'Indochine, fraîchement libéré du pénitencier de l'Île de Ré et arpentant les rue de Paris. Eastwood ne me paraît pas crédible en Français. La star transportant dans ses rides un demi-siècle de cinéma hollywoodien est depuis longtemps déjà un des visages de l'Amérique, identifiable par tout un chacun. Vouloir l'intégrer dans une trame marquée par un féroce ancrage dans le terroir de Lino Ventura était un défi un peu téméraire.

Si ce fascicule est un échec, il n'en demeure pas moins une proposition intéressante. Les deux jeunes talents découverts par la Fnac ne semblent pas avoir récidivé... Dommage.

Lire également dans nos archives :Récurrence de la figure eastwoodienne : vanités des vanitésRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 1 : Black is beautifulRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 2 : Dans l'ombre du pistoleroRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 3  : L'oncle d'IrlandeRécurrence de la figure eastwoodienne, annexe 4: Blah Blah

 
La tête à tintin
 

C'est pas celle à toto mais ça pourrait.

thomas_sangster_tintin23.jpg

Pour ceux qui ne le sauraient pas, un film sur  le belge reporter est en préparation aux U.S.A., sous la direction combinée de Steven Spielberg et Peter Jackson. Un vache de blockbuster qui à n'en pas douter va égratigner la sensibilité des puristes. La suite ici.

Il a une bonne bouille le futur Tintin, un peu sage mais pas trop.

 
Récurrence de la figure eastwoodienne : annexe 4
 

Blah Blah

Chancellor, enquêteur du futur est un agent galactique qui a un peu la gueule de Eastwood...

Du moins sur quelques cases, de temps en temps. Mais bon, il n'est pas très bien utilisé...

C'est une erreur de casting, car Chancellor n'arrête pas de jacasser, tout seul ou avec sa pote Hada Lugh. Pire on sait sans arrêt ce qu'il pense.  Or là où Eastwood est bon c'est dans la suggestion, dans l'ambiguïté et le laconisme. Si on sait ce qu'il pense en vrai, tout l'édifice s'effondre...

Non, pour ces histoires fringantes d'exotisme planétaire et de lutte contre la tyrannie, Duchâteau et Sanahujas ils auraient dû prendre un acteur volubile, un type comme Fabrice Luchini.

Chancellor, 2 tomes chez Glénat, épuisés depuis un bail...

Un pack à vendre à Aaapoum Serpente pour 24 euros (éditions originales).

Lire également :

Récurrence de la figure eastwoodienne : vanités des vanités

Récurrence de la figure eastwoodienne, annexe 1 : Black is beautiful

Récurrence de la figure eastwoodienne, annexe 2 : Dans l'ombre du pistolero

Récurrence de la figure eastwoodienne, annexe 3  : L'oncle d'Irlande 

 
Blood and Busts
 

More amazing adventures !

En effectuant des recherches pour le post d'hier, je suis tombé au détour d'une fenêtre sur le site d'un collectionneur d'affiches de cinema. D'affiches anglaises plus précisément.

Il en a beaucoup, depuis la fin des années quarante jusqu'aux années 80.  Pour tout amateur d'images fortes et surranées, la visite s'impose, d'autant plus que le site est fort clair et bien agencé, malgré des vignettes trop petites. Ces perles de la culture populaire sont classées en 8 catégories (dont une pour les films de la Hammer), de quoi satisfaire les exigences les plus variées...

www.britposters.com

Comme il a été vraiment trop dur de choisir une seule affiche pour illustrer cette notule, je vous ai ajouté une surprise de bon goût dans le lien ci-dessous...